Un inspecteur du travail a vocation à intervenir à chaque fois qu'un employeur méconnaît le droit du travail ou la convention collective applicable (C. trav. art. L 8112-1 s.). Il connaît notamment :
- des questions salariales, non-respect du Smic ou du minima conventionnel, refus de verser une prime prévue par la convention collective, inégalité hommes/femmes, etc. ;
- des conditions de travail, telles que des horaires trop importants, le non-respect des repos hebdomadaires ou le non-respect des règles d'hygiène et de sécurité, particulièrement en cas de travail difficile ou dangereux ;
- des cas de discriminations, de harcèlement ou d'atteinte à la dignité humaine.
Sauf mesure discriminatoire, l'inspecteur du travail n'a, en principe, aucun pouvoir en cas de problème lié à l'exécution du contrat de travail (par exemple, modification du contrat ou sanction disciplinaire).
De même, en dehors du cas des salariés bénéficiant d'une protection particulière (notamment : délégués du personnel, membres du comité d'entreprise), l'inspecteur ne peut empêcher un licenciement. Il peut juste tenter de résoudre le différend à l'amiable.
Par exception, le salarié qui fait l'objet d'une mutation ou dont le poste est transformé suite à l'avis du médecin du travail sur son état de santé peut contester cet avis médical en saisissant l'inspecteur du travail, qui prendra la décision finale (C. trav. art. L 4624-1, al. 3 et R 4624-34 s.). Attention : le salarié doit saisir l'inspecteur dans un délai de deux mois par lettre recommandée avec avis de réception en précisant les raisons de la contestation.
Alerté par un salarié, l'inspecteur dispose de plusieurs moyens d'actions : il adresse un courrier à l'employeur, le convoque à son bureau ou se rend dans l'entreprise pour visiter les locaux et interroger le personnel.
S'il constate une infraction, selon la nature et la gravité de celle-ci, l'inspecteur notifie à l'employeur une observation lui rappelant les règles en vigueur ou une mise en demeure de se conformer à la loi, voire dresse directement un procès-verbal qui est transmis au parquet, lequel décide alors de la suite à lui donner : poursuite ou non au pénal (C. trav. art. L 8113-7 s.).
L'inspecteur du travail a une obligation de confidentialité : il ne doit pas révéler à l'employeur qu'il intervient à la demande d'un salarié.
Son intervention est gratuite.
Pour contacter l'inspecteur du travail, il faut lui écrire, lui téléphoner ou encore, prendre rendez-vous ou se rendre à son bureau aux heures des permanences ouvertes au public.
L'inspecteur du travail à contacter est celui du lieu de travail, et non celui du domicile du salarié. Ses coordonnées (son nom et l'adresse de ses bureaux) doivent être affichées dans l'entreprise. Mais on peut aussi les trouver sur Internet (www.direccte.gouv.fr) ou à la mairie.
« Monsieur l'inspecteur du travail,
Je suis salarié de l'entreprise ABC, dont les locaux sont situés à Paris (75). Depuis quelque temps, notre employeur nous oblige à venir travailler le samedi et le dimanche, en plus de nos horaires habituels, ce qui nous amène certaines semaines à travailler plus de 60 heures. Au surplus, nous ne sommes pas payés pour ces heures supplémentaires. Je compte sur votre intervention pour faire cesser cette situation et pour faire valoir nos droits. »
En principe, les litiges touchant l'exécution du contrat de travail (rémunération, durée du travail, congés, etc.) ou sa cessation (responsabilité de la rupture, légitimité et indemnisation du licenciement, etc.) sont soumis à une juridiction spécialisée, le conseil de prud'hommes (C. trav. art. L 1411-1). Les conseillers prud'homaux ne sont pas des juges professionnels mais sont issus des syndicats de salariés et d'employeurs. Lorsqu'ils jugent une affaire, les représentants des salariés et ceux des employeurs siègent à égalité.
Par exception, toute contestation portant sur les procédures de licenciement d'au moins 10 salariés dans une même période de trente jours dans une entreprise d'au moins 50 salariés et sur les plans de sauvegarde de l'emploi doit être portée devant le tribunal administratif (C. trav. art. L 1235-7-1). Le conseil de prud'hommes reste compétent pour le contentieux du motif de licenciement.
Les juridictions administratives sont également compétentes pour statuer sur différents aspects de la rupture du contrat de travail des salariés protégés, notamment la validité d'une rupture conventionnelle (Cass. soc. 26-3-2014 no 12-21.136 : RJS 6/14 no 501) ou le caractère réel et sérieux du licenciement.
Chaque conseil de prud'hommes a sa compétence territoriale ou « ressort » (C. trav. art. R 1412-1).
Le salarié qui travaille dans un établissement donné peut saisir le conseil de prud'hommes dans le ressort duquel se situe soit cet établissement, soit le lieu de conclusion du contrat de travail ou le siège de l'entreprise.
Les personnes qui travaillent en dehors de tout établissement, par exemple les VRP ou les travailleurs à domicile, peuvent saisir soit le conseil de leur domicile, soit celui du lieu de conclusion du contrat de travail ou du siège de l'entreprise.
Le salarié doit saisir la section correspondant à l'activité principale de son entreprise, à savoir, selon le cas : industrie, services commerciaux, agriculture ou, pour ceux qui ne peuvent être rattachés à aucune de ces trois catégories, par exemple les employés de maison ou les gardiens d'immeubles, « activités diverses » (C. trav. art. R 1423-1 s.).
Toutefois, les salariés qui exercent des fonctions de commandement ou ont un certain niveau de formation relèvent de la section de l'encadrement, quelle que soit l'activité de leur entreprise. En pratique, il s'agit de ceux auxquels la qualification d'ingénieur et cadre est officiellement reconnue, dans le contrat de travail ou les bulletins de salaire, ainsi que des non-cadres qui ont une délégation du chef d'entreprise pour exercer un commandement. Les VRP sont toujours rattachés à l'encadrement.
Le salarié doit faire une demande au secrétariat-greffe du conseil de prud'hommes. En pratique, il est préférable de la faire sur place, en remplissant le formulaire fourni par le secrétariat-greffe, mais on peut aussi procéder par lettre recommandée avec avis de réception : celle-ci devra impérativement comporter les nom, prénoms, profession, adresse, nationalité, date et lieu de naissance du salarié, les nom et adresse de l'employeur, la nature et le montant des réclamations (par exemple « heures supplémentaires : x € ; rappel d'indemnité de licenciement : x € ; indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : x € ») (C. trav. art. R 1452-1 s.).
A noter que par la suite le salarié pourra modifier ses premières demandes : renoncer à certaines d'entre elles, en ajouter de nouvelles, modifier son chiffrage.
A la réception de la demande, le greffe délivre à l'intéressé un récépissé. Le lieu, la date et l'heure de la première audience, dite de conciliation, y figurent, à moins qu'ils ne soient communiqués verbalement au salarié. Ils font parfois l'objet d'une confirmation au moyen d'une convocation écrite. Le greffe se charge de convoquer l'employeur.
Le salarié n'y est pas légalement tenu.
Y a-t-il intérêt ? Oui, au moins devant le bureau de jugement, s'il demande des sommes importantes et si l'affaire est complexe. En pratique, les employeurs ont souvent recours à un avocat.
Deux autres solutions sont possibles (C. trav. art. R 1453-2) :
- contacter un syndicat de salariés. Ceux-ci ont des services juridiques spécialisés et les délégués des organisations syndicales sont habilités, comme les avocats, à assister les salariés devant les prud'hommes. Le salarié peut aussi combiner les deux formules : s'informer sur ses droits auprès d'un syndicat, puis avoir recours à un avocat, le cas échéant conseillé par ce syndicat, pour la suite de la procédure. Les défenseurs syndicaux devraient être inscrits sur une liste administrative (Projet de loi pour la croissance et l'activité dit « Macron » adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 18-6-2015) ;
- se faire assister par son conjoint, son concubin, son partenaire de Pacs ou par un salarié appartenant à la même branche d'activité.
En principe, le rôle de ces personnes comme de l'avocat ou du syndicat est d'assister le salarié, c'est-à-dire que celui-ci doit être présent avec elles aux audiences (C. trav. art. R 1453-1). Elles peuvent aussi le représenter, c'est-à-dire le remplacer, mais à deux conditions : le salarié devra justifier d'un motif légitime d'absence (par exemple une maladie ou des obligations professionnelles) et remettre à son représentant un pouvoir écrit (inutile s'il s'agit d'un avocat).
Oui : l'employeur a les mêmes droits que le salarié. Par exemple, c'est devant les prud'hommes qu'il réclamera l'indemnité compensatrice due par le salarié qui refuse d'exécuter son préavis ou qui rompt son contrat à durée déterminée avant le terme prévu ou encore qui ne respecte pas, après son départ de l'entreprise, l'obligation de non-concurrence stipulée dans son contrat.
La première étape, obligatoire (sauf cas particuliers où le bureau de jugement est saisi directement), de la procédure a lieu devant le bureau de conciliation (C. trav. art. R 1454-7 s.). Il se compose de deux juges, l'un salarié, l'autre employeur, assistés d'un greffier. Le salarié expose ses demandes, l'employeur ses réponses, et les juges tentent d'obtenir des parties qu'elles parviennent à un accord.
En cas d'accord (7 % des affaires soumises aux prud'hommes), le greffier rédige un document qui décrit l'accord intervenu et le fait signer par les parties. C'est le procès-verbal de conciliation.
En cas de désaccord, l'affaire est renvoyée devant le bureau de jugement.
L'absence du salarié ou de son représentant, sauf motif légitime, peut entraîner la radiation de sa demande.
SavoirEn cas de litige relatif à un licenciement (sauf recours contre un grand licenciement collectif), le salarié et l'employeur peuvent convenir, ou le bureau de conciliation proposer, d'y mettre un terme par accord. Cet accord prévoit le versement d'une indemnité forfaitaire qui vient s'ajouter aux éventuelles indemnités légale, conventionnelle ou contractuelle (C. trav. art. L 1235-1 et D 1235-21). Le procès-verbal constatant l'accord vaut renonciation à toute réclamation et indemnités relatives aux licenciements irréguliers et sans cause réelle et sérieuse.
En cas d'échec, le bureau de conciliation peut prendre des mesures provisoires, notamment ordonner à l'employeur (C. trav. art. R 1454-14 s.) :
- la remise de certains documents : certificat de travail, bulletins de paie ou tout autre document que l'employeur est légalement tenu de remettre au salarié, par exemple lettre de licenciement ou attestation Pôle emploi ; cette mesure peut être assortie d'une astreinte, c'est-à-dire que l'employeur devra verser au salarié, pour chaque jour de retard dans la remise des documents, une somme déterminée par le juge ;
- le versement d'une provision sur salaires, indemnités de congés payés, de préavis, de licenciement, de fin de contrat à durée déterminée ou de précarité d'emploi des travailleurs temporaires, lorsque la demande du salarié n'est pas contestable, au moins à première vue. Cette provision ne doit pas dépasser six mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois. Mais attention : « provision » veut dire avance. Le salarié devra rembourser si les juges décident après coup que la somme n'était pas due.
Le bureau de conciliation peut également prendre des mesures d'instruction, par exemple, en cas d'affaire complexe, désigner un ou deux conseillers rapporteurs chargés de rassembler les éléments d'information qui permettront au bureau de jugement de prendre sa décision.
Salarié et employeur reçoivent une convocation par lettre recommandée avec avis de réception (C. trav. art. R 1454-19).
Avant l'audience, les intéressés (ou leurs avocats) échangent des conclusions : le salarié établit un document écrit récapitulant ses arguments, joint les pièces justificatives et adresse le tout à l'employeur qui envoie, en réponse, ses propres arguments et pièces. Le plus souvent, la convocation à l'audience de jugement fixe à chaque partie des dates de remise de leurs conclusions.
Le bureau de jugement est composé de quatre conseillers, deux salariés et deux employeurs (C. trav. art. R 1423-35). L'audience de jugement, contrairement à celle de conciliation, est publique.
Il n'y a souvent qu'une audience de jugement. Toutefois :
- en cas de partage des voix des juges, il y a une nouvelle audience : c'est l'audience de départage, présidée par un magistrat professionnel, le juge départiteur (C. trav. art. L 1454-2). Les litiges pourraient être renvoyés directement devant cette formation de départage lorsque les parties le demandent ou que la nature de l'affaire le justifie (Projet de loi pour la croissance et l'activité dit « Macron » adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 18-6-2015) ;
- en cas d'affaire complexe, les juges peuvent procéder à la désignation d'un expert qui établira un rapport au vu duquel ils se prononceront (CPC art. 232). Le recours à l'expertise est, par exemple, pratiqué pour les litiges portant sur le calcul des rémunérations variables.
Les litiges portant sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire pourraient être renvoyés devant une formation restreinte du bureau de jugement, composée d'un conseiller salarié et d'un conseiller employeur, à condition que les parties en soient d'accord (Projet de loi pour la croissance et l'activité dit « Macron » adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 18-6-2015).
Rendu immédiatement après l'audience ou ultérieurement, le jugement fait l'objet d'une notification : il est adressé au salarié et à l'employeur par lettre recommandée avec avis de réception, avec l'indication du délai de recours. La date de réception de la lettre fait courir ce délai.
Elle varie considérablement selon les conseils de prud'hommes et la complexité de l'affaire : au minimum de six mois, elle peut atteindre un an ou plus ; dans la région parisienne et dans les grandes villes, les délais sont généralement longs.
Une procédure d'urgence, le référé prud'homal, permet d'obtenir une décision plus rapide : elle ne comporte pas de phase de conciliation et les délais de convocation sont très brefs (C. trav. art. R 1455-5 s.). Attention toutefois : elle n'est possible que si la demande du salarié n'est pas sérieusement contestable ou si le juge doit empêcher un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite ; de plus, la décision ou l'ordonnance de référé est toujours provisoire.
La formation restreinte (no 57041) devrait statuer dans un délai de trois mois (Projet de loi pour la croissance et l'activité dit « Macron » adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 18-6-2015).
Par ailleurs, la loi impose des délais maxima pour certaines affaires :
- pour un licenciement pour motif économique, l'audience de conciliation doit se tenir dans le mois de la saisine du conseil et le jugement intervenir dans les six mois du renvoi de l'affaire devant le bureau de jugement (C. trav. art. R 1456-1 s.) ;
- pour la qualification d'une prise d'acte de la rupture, l'affaire est portée directement devant le bureau de jugement, qui doit statuer dans un délai d'un mois suivant sa saisine (C. trav. art. L 1451-1 créé par la loi 2014-743 du 1-7-2014).
Le salarié, comme l'employeur, peut faire appel dans les cas suivants (C. trav. art. R 1462-1 s.) :
- le total des demandes à caractère salarial (salaires, primes, heures supplémentaires, indemnités de congés payés) ou le total des demandes à caractère indemnitaire (indemnités de licenciement, compensatrices de préavis ou de congés payés) dépasse un montant minimal, actuellement fixé à 4 000 € ;
- la demande a un caractère indéterminé (par exemple annulation de sanction disciplinaire).
Dans tous les autres cas, l'appel n'est pas possible : les décisions sont rendues en dernier ressort.
Les délais d'appel sont d'un mois à compter de la notification pour les jugements du conseil de prud'hommes et de 15 jours pour les ordonnances de référé (C. trav. art. R 1461-1 et R 1455-11).
Le litige est porté devant la chambre sociale de la cour d'appel, spécialisée dans les questions de droit du travail et de sécurité sociale, mais composée, à la différence du conseil de prud'hommes, de magistrats professionnels.
L'appel est fait par déclaration auprès du secrétariat-greffe de la cour d'appel par la partie perdante ou un mandataire muni, sauf s'il est avocat, d'un pouvoir spécial, soit sur place, soit par lettre recommandée avec avis de réception. La déclaration précise les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de l'auteur de l'appel (s'il s'agit d'une société : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente), les nom et adresse de son représentant, les nom et adresse de l'adversaire ainsi que le jugement dont il est fait appel. La déclaration d'appel doit être datée et signée par la personne qui fait appel. Il faut y joindre une copie de la décision contestée.
L'appel peut porter sur une partie seulement de la décision du conseil de prud'hommes ; dans ce cas, la déclaration doit préciser les points sur lesquels elle porte. La cour d'appel peut être saisie de demandes nouvelles.
Les parties peuvent se faire représenter ou assister, les personnes habilitées à le faire étant les mêmes que devant le conseil de prud'hommes.
En cas d'appel, l'employeur est en droit de différer l'exécution de la décision prud'homale jusqu'à l'arrêt de la cour.
Doivent cependant être immédiatement exécutées (on parle d'exécution provisoire) :
- les condamnations portant sur les salaires, indemnités de congés payés, de préavis, de licenciement, de fin de contrat à durée déterminée ou de précarité d'emploi des travailleurs temporaires, dans la limite de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois, ainsi que celles portant sur des documents que l'employeur est tenu de délivrer au salarié (C. trav. art. R 1454-28) ;
- les autres condamnations, lorsque l'exécution provisoire a été explicitement accordée par le conseil de prud'hommes dans sa décision, suite à une demande du salarié (CPC art. 515).
Les décisions du conseil de prud'hommes rendues en dernier ressort ainsi que les arrêts des cours d'appel peuvent faire l'objet d'un recours ou pourvoi devant la Cour de cassation. Il faut impérativement avoir recours à un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation. C'est une procédure longue et onéreuse.
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