Il existe deux types de licenciement. Le premier est appelé licenciement pour motif personnel. Les motifs qui le fondent sont liés à la personne du salarié : insuffisances professionnelles, mauvaises relations avec sa hiérarchie ou ses collègues, absentéisme ou faute disciplinaire. L'employeur a le droit de licencier un salarié en invoquant plusieurs motifs personnels, par exemple une faute grave et l'inaptitude physique du salarié. Dans ce cas, il doit respecter les procédures spécifiques à chaque cause de licenciement.
Le licenciement pour motif économique, second type de licenciement, est justifié par les difficultés économiques de l'entreprise ou sa réorganisation.
Dans certains cas, la distinction n'est pas si simple : il peut arriver qu'il y ait coexistence d'un motif économique et d'un motif personnel. Par exemple, à la suite de l'informatisation d'un service (motif économique), un salarié est licencié parce qu'il n'a pas su s'adapter aux nouvelles exigences de son poste (motif personnel). Pour déterminer la nature du licenciement, on tient compte de la cause première de celui-ci. Dans notre exemple, le licenciement est économique car la cause première du licenciement est la transformation de l'emploi, l'inaptitude professionnelle du salarié n'en étant que la conséquence.
Intérêt pratique de cette distinction : selon le motif du licenciement, la procédure et les garanties offertes au salarié diffèrent. Par ailleurs, si l'employeur se trompe et qualifie d'économique un licenciement pour motif personnel ou inversement, les juges devront considérer que le licenciement est injustifié, quand bien même le motif réel du licenciement serait légitime.
S'agissant de l'indemnisation du salarié, si le Code du travail ne fait pas varier son montant selon le motif du licenciement, sauf les cas de faute grave ou lourde, une convention ou un accord collectif le peut, par exemple en prévoyant une indemnité plus avantageuse en cas de licenciement économique (Cass. soc. 3-7-2013 no 12-13.612 : RJS 10/13 no 677).
L'employeur ne peut prononcer un licenciement que s'il repose sur un motif réel et sérieux (C. trav. art. L 1232-1). Le motif est réel s'il est exact, c'est-à-dire s'il constitue la véritable cause du licenciement, objectif, c'est-à-dire s'il est fondé sur des faits concrets, et établi, c'est-à-dire prouvé. Le motif est sérieux quand il est suffisamment important pour rendre nécessaire la rupture du contrat.
Si ces conditions ne sont pas réunies, le licenciement est jugé injustifié. Le conseil de prud'hommes condamne alors l'employeur à indemniser le salarié ; il ne peut pas imposer qu'il le réintègre.
Le licenciement pour motif personnel est, selon le cas, disciplinaire ou non. Il est disciplinaire lorsque le salarié a commis une faute, adoptant un comportement contraire aux obligations découlant de son contrat de travail en matière d'horaires, de discipline, d'hygiène et de sécurité, etc. Il n'est pas disciplinaire lorsqu'il est justifié par le comportement ou la situation du salarié, sans que celle-ci soit fautive : maladie prolongée ou insuffisance de résultats, par exemple.
La distinction entre faute légère, faute sérieuse, faute grave ou faute lourde est importante. Les conséquences sont, en effet, différentes pour le salarié. A noter que l'employeur peut être tenu par une clause du règlement intérieur ou de la convention collective limitant les motifs de licenciement pour faute ou le subordonnant au respect de certaines conditions.
La faute légère est la moins grave : retards occasionnels, oubli de pointage, altercation. Elle peut justifier un avertissement, à la rigueur une mise à pied, mais en aucun cas un licenciement.
La faute sérieuse est une faute suffisamment importante pour justifier le licenciement. C'est, par exemple, le cas de retards répétés, d'une absence non autorisée, du refus d'obéir à un ordre du supérieur hiérarchique. La faute sérieuse n'impose pas la cessation immédiate du contrat de travail : le salarié a droit à un préavis. Il ne peut davantage être privé de l'indemnité de licenciement.
La faute grave est une faute d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il s'agit notamment de la violation délibérée de consignes de sécurité, d'un vol ou de l'agression d'un collègue. Elle prive le salarié de tout droit à préavis (ou de l'indemnité compensatrice de préavis), ainsi que de l'indemnité de licenciement, mais pas de l'indemnité compensatrice de congés payés.
La faute lourde correspond à une faute d'une exceptionnelle gravité commise par le salarié avec l'intention de nuire : par exemple, détournement de fonds ou de clientèle ou manoeuvres tendant au dépôt de bilan de la société. Elle justifie la rupture immédiate du contrat, sans préavis, et prive le salarié de toutes les indemnités de rupture : indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de préavis et même indemnité compensatrice de congés payés. Elle permet également à l'employeur de réclamer au salarié des dommages-intérêts pour compenser son préjudice.
SavoirLes fautes grave et lourde impliquent le licenciement sans délai du salarié, qui est d'ailleurs généralement mis à pied à titre conservatoire le temps de la procédure. Si l'employeur attend plusieurs semaines avant d'engager la procédure, la faute grave ne sera pas reconnue par les juges (sauf si ce délai a été nécessaire à l'employeur pour apprécier la réalité et la gravité de la faute du salarié). Il en va de même si l'employeur laisse le salarié effectuer le préavis (Cass. soc. 17-4-2013 no 12-11.527 : RJS 7/13 no 520). En revanche, le versement de l'indemnité de préavis n'a pas d'incidence sur l'appréciation de la faute.
Des circonstances atténuantes peuvent être retenues par les juges pour minorer la gravité de la faute. C'est notamment le cas :
- du caractère exceptionnel de la faute ;
- du contexte dans lequel la faute a été commise ;
- de l'état de santé du salarié. Un état dépressif peut ainsi excuser des mouvements d'humeur ;
- de la tolérance de l'employeur. Par exemple, l'alcoolisme d'un salarié ne constitue pas une faute grave si l'employeur s'en est accommodé pendant de nombreuses années ;
- de la responsabilité de l'employeur dans la faute commise. Ainsi, de mauvaises conditions de travail peuvent excuser la négligence d'un salarié.
A l'inverse, des circonstances aggravantes justifient une appréciation plus sévère de la faute. Sont souvent retenus comme telles :
- la position hiérarchique élevée de l'intéressé. Certains agissements sont jugés inadmissibles s'ils sont le fait d'un chef de service, qui doit « donner l'exemple », alors qu'ils sont tolérés d'un employé subalterne ;
- le caractère répété du comportement fautif (c'est le cas de fréquents retards et absences) ;
- l'importance du préjudice subi par l'entreprise ;
- et, bien sûr, la volonté de nuire du salarié.
Le plus souvent, l'ancienneté est de nature à atténuer la gravité des faits reprochés au salarié, surtout si l'intéressé a toujours donné satisfaction. Mais dans certaines affaires, elle constitue une circonstance aggravante : il est en effet impossible à un salarié présent depuis longtemps dans l'entreprise de prétendre qu'il ignorait le caractère condamnable de ses agissements. C'est par exemple le cas d'ouvriers expérimentés ayant consommé de l'alcool au travail, leur ancienneté dans l'utilisation des machines leur donnant une conscience accrue du danger (Cass. soc. 26-6-2012 no 11-12.884 : RJS 10/12 no 779).
Il est difficile de dresser un catalogue des fautes susceptibles de justifier le licenciement et leur niveau de gravité puisque cette appréciation est faite par les juges au cas par cas, en fonction des circonstances de chaque dossier. Tout au plus peut-on énumérer dans le tableau ci-après les principales fautes invoquées comme motifs de licenciement et indiquer les solutions le plus fréquemment retenues par les tribunaux.
Motifs invoqués |
Cause réelle et sérieuse |
Faute grave |
Faute lourde |
---|---|---|---|
Abandon de poste (sortie non autorisée au cours du travail) |
Oui, sauf s'il est justifié (exemples : problèmes familiaux, de santé ou danger grave et imminent) |
Oui, si conséquences graves |
Non |
Absences non autorisées |
Oui, sauf si le salarié justifie rapidement son absence |
Oui, si récidive ou désobéissance caractérisée |
Non |
Congés : non-respect des dates (départ anticipé ou retour tardif) |
Oui, sauf motif valable (exemples : maladie, accident, grève des transports) |
Oui, si récidive ou désobéissance caractérisée |
Non |
Concurrence déloyale : création d'une entreprise concurrente ou activité pour le compte d'un concurrent |
Oui |
Oui |
Oui, si débauchage de salariés ou détournement de clientèle |
Harcèlement moral ou sexuel |
Oui |
Oui |
Non |
Dénigrement (critiques publiques) |
Oui |
Oui |
Oui, si intention de nuire |
Horaires : non-respect |
Oui, si fréquent et si désorganise l'entreprise |
Oui, si désobéissance caractérisée |
Non |
Indélicatesses (profiter de ses fonctions pour s'octroyer des avantages) |
Oui, sauf tolérance de l'employeur |
Oui, si préjudice pour l'entreprise |
Non |
Indiscrétions (divulgation d'informations confidentielles) |
Oui |
Oui |
Non |
Injures |
Oui, mais on tient compte des circonstances (exemples : milieu socioprofessionnel, provocation, fait isolé, erreur d'interlocuteur) |
Oui, si elles sont adressées à l'employeur, un supérieur hiérarchique ou à un subordonné de santé fragile |
Non |
Inobservation des règles de sécurité |
Oui |
Oui, si conséquences graves |
Oui si intention de nuire, par exemple lors d'un contrôle par les services administratifs |
Insubordination (refus d'effectuer un travail ou désobéissance) |
Oui (sauf si les conditions de travail sont dangereuses ou s'il s'agit d'une modification du contrat imposée au salarié sans son accord, ou encore si ordre illicite ou contraire à la probité) |
Oui, si persistance de ce comportement |
Non |
Ivresse |
Oui, sauf si exceptionnelle |
Oui, si conséquences graves ou préjudice pour l'entreprise |
Non |
Négligences dans le travail |
Oui |
Oui, si conséquences graves, responsabilités importantes ou comportement volontaire |
Oui, si intention de nuire |
Rixes et violences |
Oui, sauf si exceptionnelles ou provocation |
Oui |
Non |
Vols et détournements |
Oui, mais pas s'il y a un doute |
Oui, notamment si au préjudice de clients de l'entreprise |
Oui, si intention de nuire |
Usage à des fins privées du téléphone ou d'Internet au travail |
Oui s'il y a abus (usage important, répété, créant un surcoût ou une gêne pour l'entreprise) |
Oui, si conséquences graves |
Non |
Une même faute ne peut pas être sanctionnée deux fois. Si l'employeur a, par exemple, infligé un avertissement à un salarié responsable d'une rixe sur le lieu de travail, il ne peut par la suite invoquer cet incident pour le licencier ; un tel licenciement serait jugé injustifié.
Les tribunaux vont même plus loin : lorsque l'employeur, informé d'un ensemble de faits fautifs commis par un salarié, choisit de notifier un avertissement pour certains d'entre eux seulement, il épuise son pouvoir disciplinaire. Il ne peut pas s'appuyer sur les faits non sanctionnés par l'avertissement pour prononcer ensuite un licenciement (Cass. soc. 25-9-2013 no 12-12.976 : RJS 12/13 no 816).
En revanche, si le salarié commet de nouvelles fautes, identiques ou non à celles déjà sanctionnées, l'employeur peut évoquer ces dernières (à condition qu'elles aient été sanctionnées moins de trois ans auparavant : au-delà de ce délai, les sanctions sont « effacées »). En effet, une faute qui, prise isolément, ne serait pas jugée assez importante pour justifier un licenciement peut, par sa répétition ou sa conjonction avec d'autres, constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, voire une faute grave.
Des fautes connues de l'employeur depuis plus de deux mois ne peuvent pas justifier le licenciement : on dit que ces fautes sont prescrites (C. trav. art. L 1332-4).
Toutefois, cette prescription ne joue pas lorsque :
- la faute (par exemple, un vol, une escroquerie ou des coups et blessures) a donné lieu à des poursuites pénales avant la fin des deux mois ;
- le comportement fautif, vieux de plus de deux mois, a persisté au-delà. Encore faut-il alors que l'absence de réaction immédiate de l'employeur ne s'analyse pas comme une tolérance de sa part.
Des fautes commises pendant la période d'essai peuvent être invoquées par l'employeur, du moment qu'elles ne sont pas prescrites. Le maintien du salarié dans son poste à l'expiration de l'essai ne prive pas l'employeur de son pouvoir de licencier le salarié (Cass. soc. 3-12-2014 no 13-19.815 : BDP 3/15 inf. 103).
Non, si la convention collective ou le règlement intérieur prévoient que les salariés ne peuvent être licenciés qu'après un ou plusieurs avertissements.
En dehors de ce cas, le licenciement peut être prononcé dès la première faute si elle est sérieuse ; toutefois, les juges apprécient avec plus d'indulgence les faits reprochés à un salarié qui n'avait jamais jusqu'alors commis de faute.
La faute doit être personnelle au salarié. Un salarié ne peut donc pas être licencié pour des faits commis par son conjoint, ses enfants ou un membre de son entourage, s'il n'est en rien responsable de ces actes. Par exemple, le licenciement d'un salarié prononcé en raison de l'embauche de son conjoint par une entreprise concurrente est injustifié. Il en est de même du licenciement d'une employée à la suite des violences exercées par son père sur son employeur, dès lors qu'elle n'en était pas l'instigatrice.
En revanche, est justifié le licenciement d'une employée de banque prononcé en raison d'un vol d'argent liquide par son fils dans l'agence où elle travaillait et à l'aide des clés qu'elle détenait et qu'elle n'avait pas placées hors de portée.
En principe, le salarié absent pour maladie ne peut pas être licencié pour ce seul motif dès lors qu'il a prévenu l'employeur et lui a adressé un certificat médical d'arrêt de travail. La loi interdit, en effet, de licencier un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap (C. trav. art. L 1132-1), sauf inaptitude constatée par le médecin du travail.
Par exception, les juges admettent le licenciement d'un salarié souvent malade ou en longue maladie si ses absences perturbent le fonctionnement de l'entreprise et rendent nécessaire son remplacement définitif, c'est-à-dire l'embauche d'un salarié sous contrat à durée indéterminée avec une durée du travail équivalente. Mais le licenciement ne sera pas reconnu légitime si l'absence du salarié est la conséquence du harcèlement qu'il a subi de la part de son employeur. De même, si l'absence est consécutive à un épuisement professionnel dû à une surcharge de travail (Cass. soc. 13-3-2013 no 11-22.082 : RJS 5/13 no 361). Le licenciement n'est pas davantage justifié si le salarié licencié n'est pas ou n'est que partiellement remplacé ou encore s'il est remplacé par recours à un prestataire de services, à des intérimaires ou par une personne embauchée par une autre société du même groupe.
Certaines conventions collectives comportent des clauses dites de garantie d'emploi, qui interdisent aux employeurs de licencier les salariés malades pendant une période déterminée pour un motif se rattachant à leur état. Un licenciement pour ce motif pendant cette période est injustifié.
Mais il ne faut pas confondre garantie d'emploi et garantie de ressources. Lorsque la convention collective se borne à prévoir le maintien du salaire pendant une certaine durée de maladie, l'employeur peut licencier le salarié s'il justifie de la perturbation causée par son absence et de la nécessité de le remplacer définitivement.
Si à la suite d'une maladie ou d'un accident le salarié est déclaré inapte à reprendre ses fonctions par le médecin du travail, l'employeur doit tenter de le reclasser dans un autre emploi correspondant à ses capacités et aussi comparable que possible à celui précédemment occupé (C. trav. art. L 1226-2 s. et L 1226-10 s.). La recherche d'un poste de reclassement doit intervenir dans le mois qui suit le dernier examen médical de reprise ; cette période n'est pas rémunérée, sauf en cas d'inaptitude consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle (versement possible, sous certaines conditions, d'indemnités journalières de sécurité sociale). Si l'employeur procède au licenciement sans avoir cherché à reclasser le salarié, ce dernier a droit à des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à l'indemnité compensatrice de préavis. Cependant, si le médecin a indiqué que le maintien du salarié dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé, l'employeur pourrait être dispensé de rechercher un reclassement (Projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi, dit « projet Rebsamen », adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 2-6-2015).
Si le reclassement est impossible ou si le salarié le refuse, l'employeur doit licencier ; c'est une obligation. Le refus du poste de reclassement ne constitue pas une faute du salarié et n'est pas de nature à le priver des indemnités de rupture.
A défaut de reclassement ou de licenciement dans le mois qui suit l'examen médical de reprise, l'employeur doit reprendre le versement du salaire. S'il ne le fait pas, le salarié se voit reconnaître une option : soit exiger la poursuite de son contrat de travail même s'il n'exerce aucune activité, soit faire constater la rupture de son contrat, celle-ci étant automatiquement jugée comme un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 29-9-2004 no 02-43.746 : RJS 12/04 no 1273).
SavoirSi son inaptitude a pour origine une faute inexcusable de l'employeur commise dans l'exécution du contrat de travail, le salarié a droit non seulement à une réparation forfaitaire par l'allocation de prestations de sécurité sociale, mais aussi à des dommages et intérêts complémentaires au titre des préjudices non couverts par les prestations sociales tels que le préjudice sexuel ou un déficit fonctionnel temporaire. Le montant de cette indemnité est librement évalué par le juge. Il est payé, à titre d'avance, par la caisse primaire d'assurance maladie qui se charge de le récupérer auprès de l'employeur.
L'insuffisance professionnelle peut justifier un licenciement, même sans faute volontaire du salarié et sans préjudice chiffrable pour l'entreprise. C'est par exemple le cas si le salarié :
- commet des erreurs ou des malfaçons dans le travail ;
- fait preuve d'un manque de compétence, d'autorité ou de motivation.
Toutefois, cette appréciation ne doit pas être arbitraire : l'employeur doit invoquer des faits précis et vérifiables. A cet égard, les juges recherchent si certaines circonstances ne contredisent pas le grief avancé, par exemple : de nombreuses promotions, une récente augmentation de salaire ou l'absence de reproches antérieurs.
Par ailleurs, le licenciement ne sera pas justifié s'il apparaît que l'employeur a une part de responsabilité. C'est le cas s'il n'a pas fait bénéficier le salarié de la formation nécessaire ou si l'insuffisance du salarié est due à de mauvaises conditions de travail.
Enfin, l'employeur ne peut reprocher au salarié des erreurs dans son travail si ses tâches ne correspondent pas à sa qualification et à l'activité pour laquelle il a été recruté.
C'est un motif relativement fréquent de licenciement pour les représentants, les commerciaux ou les vendeurs. Est-ce un motif valable ? Oui, si le salarié s'est vu fixer des objectifs commerciaux, soit de façon contractuelle, soit unilatéralement par l'employeur (Cass. soc. 22-5-2001 no 99-41.838 : RJS 8-9/01 no 998). Encore faut-il que ces objectifs soient réalistes, c'est-à-dire compatibles avec la situation du marché, et que le salarié ait les moyens de les atteindre. Son licenciement est injustifié si l'insuffisance de résultats ne lui est pas imputable mais est due à des circonstances extérieures ou à l'employeur, par exemple s'il décide de ne plus travailler avec certains clients importants.
La non-réalisation des objectifs doit par ailleurs être établie. Le licenciement n'est donc pas justifié si l'employeur, avant la fin de la période fixée pour atteindre les objectifs, reproche une insuffisance de résultats à partir d'une projection des résultats partiels obtenus.
Qu'en est-il en l'absence d'objectifs expressément chiffrés ? L'insuffisance de résultats ne constitue pas en soi une cause de licenciement. Elle ne peut justifier une telle mesure que si elle est objective (notamment par comparaison avec les résultats des collègues), durable et liée à l'incompétence ou à une faute du salarié. Le licenciement ne sera pas justifié si les mauvais résultats du salarié sont dus à une concurrence importante dans le secteur, une conjoncture économique difficile, ou si l'employeur en est directement responsable (non-prise en compte des réserves formulées par le médecin du travail sur l'aptitude du salarié à exercer l'emploi occupé, par exemple).
Même à un poste de haut niveau, un salarié ne peut pas être licencié en raison des soupçons de l'employeur sur son manque de loyauté ou d'honnêteté : la perte de confiance ne constitue pas un motif valable de licenciement. Seuls les éléments objectifs sur lesquels elle repose peuvent, le cas échéant, justifier le licenciement.
Par exemple, le licenciement d'un salarié en raison d'une poursuite pénale pour tentative de vol qui s'est conclue par une relaxe est abusif, mais pas celui du salarié dont la condamnation a reçu une large publicité dans la presse, causant ainsi un préjudice à l'entreprise.
De même, il n'est pas possible de licencier un salarié du seul fait de :
- l'embauche de son conjoint par une entreprise concurrente et du risque de concurrence ;
- l'acquisition par lui et son épouse d'un fonds de commerce que cette dernière exploite et dont l'activité concurrence directement l'employeur.
Il en va autrement si le salarié se rend coupable d'actes positifs de concurrence.
Les salariés ont une liberté d'expression pouvant aller jusqu'à un droit à la critique, dans la mesure où ils n'expriment pas leur désaccord dans des conditions nuisant à l'entreprise. Mais l'exercice de ce droit peut justifier un licenciement s'il dégénère en abus. Les termes employés ne doivent être ni injurieux ni diffamatoires et les critiques émises ne doivent être divulguées ni à l'ensemble du personnel ni à l'extérieur de l'entreprise. Ainsi, l'employeur peut reprocher des propos tenus dans l'espace non confidentiel du réseau social Facebook.
Par exemple, ne justifie pas un licenciement le fait que :
- un directeur administratif et financier, à la suite du rachat de son entreprise, envoie au nouveau comité de direction une lettre très critique : pas d'abus car l'intéressé, chargé d'une mission de très haut niveau dans des circonstances difficiles, peut être amené à formuler, dans l'exercice de ses fonctions et à l'intérieur du cercle restreint du comité directeur dont il est membre, des critiques même vives concernant la nouvelle organisation ;
- une salariée adresse un courriel aux actionnaires et dirigeants de son entreprise pour critiquer ses conditions de travail et de rémunération dès lors que ce courriel ne comporte pas de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs ;
- un directeur commercial dénonce à la maison mère le caractère incohérent et désastreux des décisions prises par son président.
A l'inverse, est justifié le licenciement :
- du directeur d'une association qui a systématiquement dénigré l'association et tenu des propos injurieux à l'encontre des administrateurs ;
- d'un élu du comité d'entreprise qui a insulté le directeur des ressources humaines au cour d'une réunion du comité ; compte tenu du caractère houleux de la réunion, la faute grave a été écartée, le salarié conservant son droit aux indemnités de rupture ;
- d'un cadre qui a adressé aux organismes chargés de délivrer les agréments permettant à son entreprise de fonctionner la copie d'une lettre dans laquelle il reprochait à son employeur des manquements à la réglementation du travail. Une telle attitude qui porte tort à la réputation et à la crédibilité de l'entreprise constitue une faute grave.
Si des mouvements d'humeur passagers sont excusables, la mésentente persistante entre deux salariés peut justifier le licenciement dès lors qu'elle crée un trouble dans l'entreprise, par exemple en détériorant le climat dans un service. Encore faut-il que le salarié licencié soit directement responsable de cette mésentente et que l'employeur ait tenté d'apaiser les esprits et de trouver une solution de conciliation. A défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
La loi interdit les licenciements discriminatoires liés à la personne même du salarié, notamment à sa race, sa religion ou ses moeurs. De manière générale, les tribunaux jugent injustifiés les licenciements motivés par des faits de la vie personnelle, sans relation avec le travail. Ainsi, ne sauraient a priori justifier le licenciement :
- l'achat d'une voiture d'une marque concurrente de celles vendues par l'entreprise ;
- un placement en garde à vue dissimulé à l'employeur ;
- l'émission de chèques sans provision ;
- un déjeuner avec un ancien collègue en procès avec l'employeur.
Même des faits commis en dehors du temps de travail et à l'extérieur de l'entreprise mais se rattachant à la vie professionnelle du salarié ne peuvent justifier son licenciement pour faute. Ainsi de la perte du permis de conduire pour excès de vitesse ou état d'ébriété.
La solution est différente si le comportement privé du salarié a créé un trouble au sein de l'entreprise. C'est par exemple le cas lorsque le salarié s'est montré violent lors d'un voyage d'agrément organisé par l'employeur (Cass. soc. 8-10-2014 no 13-16.793 : RJS 12/14 no 837) ou encore lorsque la perte de son permis de conduire empêche le salarié d'accomplir les missions pour lesquelles il a été engagé (Cass. soc. 1-4-2009 no 08-42.071).
Tout dépend des règles applicables dans l'entreprise. Si le règlement intérieur impose le port d'une tenue particulière (par exemple une blouse ou des chaussures de chantier), les salariés doivent s'y conformer. Tout refus peut justifier une sanction disciplinaire, voire un licenciement. Toutefois, les consignes du règlement intérieur ne s'imposent au salarié que si elles sont justifiées par la tâche à accomplir et en rapport avec le but recherché, notamment des raisons de sécurité. Dans le cas contraire, le refus du salarié ne justifie pas son licenciement.
Les fonctions et les conditions de travail du salarié peuvent également justifier certaines contraintes vestimentaires. Le refus persistant du salarié de s'y plier peut être considéré comme un acte d'insubordination passible de licenciement. Est, par exemple, justifié le licenciement d'un technicien qui a persisté à porter un bermuda malgré l'interdiction de son employeur. A l'inverse, se déchausser dans un bureau où des visiteurs sont susceptibles d'être reçus, en dépit des remarques de l'employeur, ne justifie pas un licenciement dès lors que ce comportement ne s'est pas accompagné d'impertinence à l'égard de la hiérarchie et qu'il n'est pas établi qu'une personne extérieure à l'entreprise en ait été témoin.
L'employeur peut interdire le port d'un signe religieux si l'entreprise assure une mission de service public (Cass. soc. 19-3-2013 no 12-11.690 : RJS 5/13 no 346) ; dans ce cas, le refus d'ôter un voile islamique justifie le licenciement de la salariée (Cass. ass. plén. 25-6-2014 no 13-28.369 : RJS 10/14 no 667). Une telle interdiction peut également être justifiée par des raisons objectives étrangères à toute discrimination, comme des impératifs d'hygiène et de sécurité (CEDH 15-1-2013 no 59842/10 : RJS 5/13 no 420). Un employeur du secteur marchand peut-il interdire le port de signes religieux uniquement pour satisfaire ses clients ? La question a été posée par la Cour de cassation à la Cour de justice de l'Union européenne, qui devrait y répondre en 2016.
En l'absence de règlement intérieur ou de fonctions spécifiques, la liberté est de règle. L'employeur ne peut sanctionner les salariés à cause de leur tenue vestimentaire si celle-ci n'entraîne aucune perturbation dans l'entreprise. Est ainsi injustifié le licenciement d'un copilote en raison de ses négligences vestimentaires.
SavoirLa jurisprudence se montre très sévère lorsque le motif de licenciement est fondé sur l'apparence physique. L'employeur doit justifier d'éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Ainsi, n'est pas justifié le licenciement d'un chef de rang d'un restaurant gastronomique qui avait refusé de retirer, le temps du service, les boucles d'oreille qu'il portait : le licenciement avait pour cause l'apparence physique rapportée au sexe du salarié (Cass. soc. 11-1-2012 no 10-28.213 : RJS 3/12 no 214).
L'employeur qui envisage un licenciement pour motif personnel doit respecter une procédure (C. trav. art. L 1232-2 s.).
Avant de licencier, il doit observer certaines formalités permettant à l'intéressé de connaître les motifs du licenciement et de se défendre. En cas de non-respect de cette procédure, le licenciement est irrégulier et le salarié peut éventuellement obtenir à ce titre une indemnité.
A noter que les salariés protégés, au nombre desquels figurent les représentants du personnel, bénéficient d'une procédure spéciale : notamment, leur licenciement doit être autorisé par l'inspection du travail.
Première étape de la procédure : le salarié doit être convoqué par l'employeur à un entretien préalable. Cette convocation, qui est obligatoirement écrite, lui est remise contre décharge ou adressée par lettre recommandée ou par tout autre moyen ne laissant aucun doute sur la date de l'envoi de la convocation (envoi par Chronopost, notification par huissier, par exemple).
La lettre de convocation doit indiquer l'objet de l'entretien, c'est-à-dire mentionner qu'un licenciement est envisagé, la date, l'heure et le lieu de l'entretien. Il a été jugé qu'en cas de licenciement disciplinaire, les causes de l'entretien, donc les raisons de la sanction, doivent figurer dans la lettre de convocation afin de permettre le respect des droits de la défense (CA Paris 7-5-2014 no 12/02642). Cette lettre doit également préciser au salarié qu'il peut se faire assister lors de l'entretien par une personne de son choix appartenant à l'entreprise ou, en l'absence de représentant du personnel, par un conseiller extérieur inscrit sur une liste spéciale. La convocation doit indiquer l'adresse où cette liste peut être consultée.
Si le licenciement est envisagé pour faute disciplinaire, l'employeur ne peut pas convoquer le salarié à l'entretien préalable dans un délai de plus de deux mois après avoir eu connaissance de la faute.
Le plus souvent, l'entretien se déroule sur le lieu de travail ou au siège de l'entreprise. Il peut se dérouler dans un autre lieu si cela se justifie (par exemple, indisponibilité des locaux de l'entreprise). Excepté lorsque l'entretien se déroule sur le lieu de travail, le salarié peut obtenir sur justificatif le remboursement de ses frais de transport.
La date de l'entretien doit être fixée de manière que le salarié dispose du temps nécessaire pour préparer sa défense et contacter la personne qui l'assistera lors de l'entretien. Un délai d'au moins cinq jours ouvrables (tous les jours, sauf les dimanches et les jours fériés) doit être respecté entre la réception de la lettre de convocation (première présentation du recommandé ou remise au salarié) et la date de l'entretien ; il s'agit de cinq jours « pleins » : les jours de la réception (ou de la première présentation de la LRAR) et de l'entretien ne comptent pas.
Le salarié peut-il demander le report de l'entretien ? Oui, mais l'employeur n'est pas tenu d'accepter. S'il donne son accord, il doit simplement informer le salarié, par tous moyens utiles, des nouvelles date et heure de l'entretien sans avoir à adresser de nouvelle convocation (Cass. soc. 29-1-2014 no 12-19.872 : RJS 4/14 no 308).
Le plus souvent, l'entretien est organisé pendant le temps de travail. Mais la convocation du salarié à un entretien en dehors de ses heures de travail ou à une date correspondant pour lui à un jour de repos ne rend pas la procédure irrégulière.
Non. L'entretien préalable a été institué dans le seul intérêt du salarié, pour lui permettre de se défendre. L'intéressé a donc le droit de ne pas se rendre à l'entretien. Mais cette absence ne saurait bloquer la suite de la procédure : l'employeur peut adresser au salarié la lettre de licenciement dès que les délais requis sont écoulés.
S'il le souhaite, le salarié peut se faire assister lors de l'entretien par une personne de son choix, appartenant au personnel de l'entreprise (pas nécessairement du même établissement). Le plus souvent, ce sera un représentant du personnel ou un délégué syndical, mais ce peut être également un simple collègue.
En l'absence de représentant du personnel ou de délégué syndical, le salarié peut faire appel à un conseiller extérieur à l'entreprise inscrit sur une liste spéciale. En pratique, le salarié se procure cette liste à la mairie (du lieu de son domicile s'il demeure dans le même département que celui où il travaille, du lieu de travail sinon) ou auprès de l'inspection du travail. La liste mentionne la profession de chaque conseiller et son appartenance syndicale. Le salarié communique au conseiller de son choix la date, l'heure et le lieu de l'entretien. La personne sollicitée confirme sa venue ou fait savoir qu'elle ne peut pas se rendre à l'entretien. Dans cette situation, le salarié peut choisir une autre personne sur la liste.
Lors de l'entretien, le rôle du conseiller est multiple. Il peut demander des explications à l'employeur, compléter celles du salarié, présenter des observations. Par la suite, il pourra témoigner en justice des déclarations faites lors de l'entretien.
Cette assistance est totalement gratuite pour le salarié comme pour l'employeur.
Il est interdit à l'employeur de faire appel à quelqu'un d'extérieur à l'entreprise, avocat ou conseil. Le salarié pourrait refuser leur présence ou invoquer cette circonstance pour réclamer par la suite une indemnité pour procédure irrégulière.
En revanche, l'employeur peut se faire assister par une personne appartenant à l'entreprise (le comptable, par exemple), voire même par plusieurs personnes, à condition que cela ne porte pas préjudice au salarié. A par exemple été jugée irrégulière la procédure de licenciement d'une secrétaire médicale qui s'était retrouvée seule face à trois cogérants d'un cabinet (Cass. soc. 12-12-2013 no 12-21.046 : RJS 2/14 no 110).
Au cours de l'entretien, l'employeur ou son représentant doit indiquer au salarié le ou les motifs de la décision envisagée. Même si, le plus souvent, l'employeur a déjà arrêté sa décision avant l'entretien, celui-ci doit en principe permettre un dialogue : le salarié et son assistant demandent des explications complémentaires, en fournissent, etc. Les propos tenus par le salarié ne peuvent pas constituer une cause de licenciement.
Il est interdit à l'employeur comme au salarié d'enregistrer l'entretien à l'insu de l'autre sous peine d'éventuelles sanctions pénales. Même avec l'accord des intéressés, l'enregistrement n'est pas une preuve admise. En revanche, l'employeur, le salarié ou celui qui a assisté ce dernier peut rédiger un compte rendu.
L'employeur n'est pas dispensé de la formalité de l'entretien préalable lorsque son salarié est malade. Il n'est pas tenu de le différer jusqu'à la guérison. Mais il doit l'organiser de telle sorte que le salarié puisse prendre connaissance des motifs du licenciement et faire part de ses observations. Notamment, il doit fixer l'heure de l'entretien durant les heures de sortie autorisées par le médecin.
La mise à pied conservatoire permet à l'employeur d'écarter le salarié de l'entreprise jusqu'au prononcé du licenciement s'il a commis une faute particulièrement grave. Elle est le plus souvent notifiée par écrit dans la convocation à l'entretien préalable.
Ce n'est pas une sanction. Mais si l'employeur ne précise pas que la mise à pied est prononcée dans l'attente d'un licenciement ou s'il n'engage pas immédiatement une procédure de licenciement, les juges peuvent considérer qu'il s'agit d'une mise à pied disciplinaire, donc d'une véritable sanction ; dès lors, en vertu de l'interdiction de sanctionner deux fois les mêmes faits, le licenciement sera jugé injustifié. Notons toutefois que lorsque l'employeur a porté plainte au pénal, il peut mettre à pied à titre conservatoire et attendre l'issue du procès pour engager le licenciement (Cass. soc. 4-12-2012 no 11-27.508 : RJS 2/13 no 119).
Le salarié n'a droit à aucune rémunération pendant la mise à pied conservatoire. Si la faute grave est finalement écartée soit par l'employeur (qui peut par exemple opter pour un licenciement pour insuffisance professionnelle), soit par les juges, le salarié pourra réclamer le salaire correspondant à cette période.
Si, à l'issue de l'entretien, l'employeur ne change pas d'avis, il poursuit la procédure et notifie le licenciement. Le salarié doit être avisé de son licenciement par lettre recommandée avec avis de réception ou remise en main propre. L'envoi d'une lettre simple n'entraîne ni la nullité du licenciement ni l'irrégularité de la procédure. Mais, en cas de litige, elle oblige l'employeur à établir la réalité et la date du licenciement.
La remise de la lettre, non par l'employeur, mais par un tiers, ne rend pas le licenciement sans cause réelle et sérieuse, seule peut être invoquée une irrégularité de procédure (Cass. soc. 23-10-2013 no 12-12700 : RJS 1/14 no 24).
Si le salarié refuse de réceptionner la lettre de licenciement, la rupture du contrat de travail est néanmoins consommée à compter de la date d'envoi du recommandé ou de la tentative de remise du courrier.
Si le salarié ne reçoit pas la lettre, à cause d'une erreur d'adresse, par exemple, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse (à moins que le salarié n'ait déménagé sans donner sa nouvelle adresse). Il en est de même si une erreur dans le prénom l'empêche de retirer à la poste la lettre envoyée en recommandé.
Quant au licenciement verbal, il rompt le contrat de travail malgré son irrégularité. Mais ce licenciement sera jugé injustifié en raison de l'absence de motivation.
La lettre de licenciement, qui doit être signée de l'employeur, confirme la rupture du contrat de travail et les motifs retenus. En cas de contestation devant le conseil de prud'hommes, seuls ces derniers seront examinés par les juges même si d'autres ont été évoqués lors de l'entretien préliminaire.
L'absence d'indication des motifs dans la lettre de licenciement équivaut à une absence de motifs, et le salarié peut réclamer devant les prud'hommes des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il en va ainsi même si l'employeur a informé le salarié des causes du licenciement par d'autres moyens, par exemple lors de l'entretien préalable ou par un courrier postérieur à la lettre de licenciement. En revanche, si l'employeur joint à la lettre de licenciement, en y faisant expressément référence, une note précisant les motifs de sa décision, le licenciement est motivé.
L'imprécision des motifs invoqués est assimilée à une absence de motivation. Par exemple, le licenciement n'est pas justifié lorsqu'il est seulement indiqué que le salarié est licencié pour manque de motivation, incompatibilité d'humeur, ou encore pour des « négligences », sans préciser la nature des défaillances qui lui sont reprochées.
Avant d'envoyer la lettre de licenciement, l'employeur doit attendre au minimum deux jours ouvrables après l'entretien préalable. Par exemple, si l'entretien a lieu un mardi, la lettre pourra être expédiée au plus tôt le vendredi.
Si le salarié est licencié pour faute disciplinaire, l'employeur a un délai maximum d'un mois pour envoyer la lettre de licenciement. Par exemple, si l'entretien a eu lieu le 11 décembre, la lettre doit être envoyée avant le 12 janvier. Après ce délai, l'employeur devra renoncer à son projet.
Le fait que le salarié soit absent pour maladie ou pour congés payés n'empêche pas l'employeur de poursuivre la procédure et de lui envoyer la lettre de licenciement.
Une fois la lettre de licenciement expédiée, l'employeur ne peut pas revenir sur sa décision de licencier. Celle-ci est définitive, sauf si le salarié, à la demande de l'employeur, accepte de ne pas tenir compte de la lettre ou si l'employeur n'a pas été informé d'une impossibilité de licenciement (état de grossesse non encore communiqué).
En principe, la réception par le salarié de la lettre de licenciement n'entraîne pas son départ immédiat de l'entreprise : il a droit à un délai de préavis, pendant lequel son contrat est maintenu. Il n'en va autrement qu'en cas de faute grave ou lourde ou d'inaptitude physique (étant précisé que si l'inaptitude est d'origine professionnelle, le salarié perçoit une indemnité compensatrice de préavis).
Si le salarié est dans l'incapacité de travailler, notamment parce qu'il est en arrêt maladie ou en congé parental, la date de fin de son contrat reste celle du dernier jour de son préavis mais il ne bénéficie pas d'une indemnité compensatrice. Or, ce n'est qu'à compter de cette date de fin de contrat qu'il pourra s'inscrire à Pôle emploi. Dans l'hypothèse où il ne perçoit aucune rémunération (par exemple en congé parental), il peut donc avoir intérêt à demander à écourter ce préavis afin de percevoir au plus tôt les allocations chômage.
Le non-respect du préavis ouvre droit à une indemnité compensatrice. Elle est due par :
- l'employeur s'il rend impossible l'exécution du préavis ;
- le salarié s'il quitte l'entreprise de façon anticipée sans autorisation de l'employeur.
Elle dépend de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise (C. trav. art. L 1234-1) :
- entre six mois et moins de deux ans d'ancienneté : le préavis est d'un mois ;
- à partir de deux ans d'ancienneté : le préavis est de deux mois.
En dessous de six mois d'ancienneté, la durée du préavis est fixée par la convention collective, ou à défaut par les usages applicables dans la profession ou localement.
Des durées particulières sont prévues par la loi pour certains salariés. C'est notamment le cas des VRP (un mois la 1e année, deux mois la 2e , trois mois au-delà) et des handicapés (deux mois entre six mois et deux ans d'ancienneté, trois mois à partir de deux ans d'ancienneté).
En outre, dans tous les cas, il faut consulter la convention collective applicable ainsi que le contrat de travail : s'ils prévoient soit un préavis plus long pour le salarié, soit des conditions d'ancienneté plus courtes, le salarié doit en bénéficier.
Le point de départ du préavis correspond à la date de première présentation au salarié de la lettre recommandée de licenciement (C. trav. art. L 1234-3). Il n'est pas reporté si l'intéressé est en arrêt de travail pour maladie lors de la notification du licenciement. Il l'est, en revanche, si le salarié est licencié pendant ses congés payés : le préavis ne commence à courir qu'à la fin de ses congés.
Pendant le préavis, le salarié doit continuer à travailler aux conditions habituelles. L'employeur ne peut pas lui demander d'effectuer des tâches différentes ou correspondant à une qualification inférieure. Il ne peut davantage le contraindre à l'inactivité. S'il tente de lui imposer une telle modification, le salarié est en droit d'interrompre le préavis et de réclamer une indemnité compensatrice.
Le salarié doit percevoir son salaire habituel, y compris les primes. Si une augmentation de salaire est accordée à l'ensemble du personnel, il doit en bénéficier.
De manière générale, l'intéressé peut réclamer tous les droits individuels et collectifs liés à la qualité de salarié dans l'entreprise (titres-restaurant, etc.).
SavoirEn cas de faute grave ou lourde commise ou découverte pendant le préavis, l'employeur est fondé à ordonner le départ immédiat du salarié, selon les formes prévues pour la procédure disciplinaire.
Le salarié est payé pour la partie effectuée du préavis, mais ne peut pas réclamer une indemnité compensatrice pour celle restant à courir.
Il conserve le bénéfice de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité de congés payés, même en cas de faute lourde.
La plupart des conventions collectives accordent aux salariés deux heures par jour sans perte de salaire pour rechercher un nouvel emploi, d'autres prévoient une durée globale de 50 heures par mois. Certaines conventions imposent de prendre ces heures chaque jour, d'autres permettent une prise groupée en fin de préavis. Si la convention est muette sur ce point, employeur et salarié se mettent d'accord sur les modalités d'utilisation de ces heures ; à défaut d'accord, ces modalités sont fixées un jour au gré de l'employeur, un jour au gré du salarié.
Cette faculté cesse dès que le salarié a retrouvé un emploi.
Le salarié qui n'utilise pas son droit aux absences pour recherche d'emploi ne peut pas exiger une indemnité à titre de compensation.
L'absence du salarié pour maladie ou accident autre que de travail pendant le préavis ne retarde pas la fin de celui-ci : le contrat s'achève à la date initialement prévue, sans être prolongé de la durée de l'absence. Par exemple, si un salarié est licencié à compter du 10 avril avec un préavis d'un mois, son contrat prendra fin le 10 mai, même s'il a été absent deux semaines pour maladie.
La solution est différente s'il s'agit d'un accident du travail : le préavis est interrompu jusqu'au retour du salarié (Cass. soc. 18-7-1996 no 93-43.581 : RJS 10/96 no 1040).
Si les dates des congés avaient été fixées avant le licenciement ou si l'employeur et le salarié sont d'accord, ce dernier peut partir en congés pendant le préavis. En principe, préavis et congés payés ne se confondent pas : le préavis est donc interrompu pendant toute la durée des congés et ne reprend qu'après. Mais l'employeur et le salarié peuvent opter pour la solution contraire et décider que la prise des congés ne retardera pas la fin du préavis.
Un salarié est licencié à compter du 1er juin avec un préavis de trois mois. S'il prend ses congés payés du 1er juillet au 1er août, le préavis sera interrompu pendant cette période et s'achèvera un mois après la date prévue, donc seulement le 30 septembre. Mais l'employeur et le salarié peuvent se mettre d'accord pour que le contrat prenne fin le 31 août, la durée des congés payés se confondant alors pour partie avec celle du préavis. Attention : dans ce cas, l'indemnité compensatrice de congés payés sera réduite, voire supprimée.
Lorsque l'employeur souhaite voir le salarié quitter l'entreprise avant la fin du préavis, ce dernier ne peut s'y refuser sauf si cette décision lui cause un préjudice, par exemple, parce qu'elle est de nature à faire croire aux collègues et à la clientèle qu'il a commis une faute grave.
Durant le préavis, dès lors qu'il a été dispensé de l'effectuer et même s'il est entré au service d'un nouvel employeur, le salarié continue à bénéficier des mêmes droits qu'auparavant, notamment de la même rémunération et des mêmes avantages, y compris des primes liées à une condition de présence. S'agissant du véhicule de fonction, il peut le conserver dès lors qu'il en avait un usage privé (Cass. soc. 11-7-2012 no 11-15.649 : RJS 10/12 no 793). Le préavis non effectué est pris en compte pour le calcul de l'ancienneté et ouvre droit à RTT et congés payés.
L'employeur choisit soit de continuer à assurer le versement du salaire aux dates d'échéance normales, donc mois par mois, et de procéder à l'arrêté des comptes en fin de préavis, soit de verser une indemnité compensatrice de préavis en totalité lors du départ du salarié de l'entreprise, quitte à verser un rappel en fin de préavis si une augmentation générale est intervenue pendant cette période.
ConseilSi votre employeur vous propose verbalement de vous libérer du préavis, exigez une confirmation écrite. En cas de contestation, c'est au salarié de prouver que l'employeur l'en a dispensé. Ne suffisent à établir la preuve de la dispense ni l'absence de mise en demeure d'effectuer le préavis, ni le défaut de précision dans la lettre de licenciement sur l'exécution de celui-ci, ni la mention « libre de tout engagement » figurant sur le certificat de travail.
Il faut obtenir l'accord de l'employeur. Si celui-ci accepte, le contrat prend fin à la date du départ effectif du salarié. Ce dernier ne peut pas réclamer une indemnité compensatrice pour le préavis non effectué.
Si l'employeur refuse, le salarié doit s'incliner. S'il passe outre, il prend le risque d'être condamné par le conseil de prud'hommes à réparer le préjudice subi par l'employeur, en lui versant au minimum l'équivalent de l'indemnité compensatrice de préavis.
L'employeur a le droit de contrôler l'activité de ses salariés, mais il a une obligation d'information :
- le comité d'entreprise doit être consulté avant la mise en place d'un dispositif de surveillance (sauf s'il est installé dans des entrepôts ou dans des locaux de rangement dans lesquels aucun salarié ne travaille) ;
- les salariés doivent être informés des moyens mis en oeuvre, y compris lorsque le dispositif de surveillance est installé dans une entreprise cliente où le salarié est appelé à intervenir (Cass. soc. 10-1-2012 no 10-23.482 : RJS 3/12 no 212) ;
- si les informations recueillies alimentent des fichiers informatisés (commutateur téléphonique permettant l'enregistrement des numéros de téléphone appelés par les salariés, par exemple), l'employeur doit déclarer le dispositif de surveillance à la Cnil sous peine de sanctions pénales ; de plus, il ne peut en principe pas sanctionner un salarié qui refuse de se soumettre à un dispositif non déclaré à la Cnil. Toutefois, même en l'absence d'une telle déclaration, les enregistrements d'un dispositif obligatoire tel un chronotachygraphe dans un camion sont opposables au salarié (Cass. soc. 14-1-2014 no 12-16.218 : RJS 3/14 no 281).
Autre condition posée par la loi : les moyens de contrôle utilisés doivent être « justifiés par la nature de la tâche à accomplir et proportionnés au but recherché » (C. trav. art. L 1121-1). L'atteinte aux droits fondamentaux de la personne (respect de la vie privée, secret des correspondances, etc.) doit être la moins grave possible. La nécessité d'assurer la sécurité des employés ou des marchandises peut justifier la mise en place d'un système de surveillance. L'installation d'un dispositif permettant la géolocalisation d'un véhicule afin de contrôler la durée de travail n'est admise que si l'employeur n'a pas d'autre moyen d'effectuer ce contrôle et si le salarié concerné ne dispose pas d'une liberté d'organisation de son travail ; de la même façon, l'installation de systèmes de vidéosurveillance n'est pas contestée à condition qu'en soient exclus les espaces de repos et de détente du personnel. En revanche, l'installation dans une entreprise d'un dispositif biométrique de contrôle (mémorisation de l'empreinte digitale de chaque salarié sur une carte à puce correspondant à un numéro de badge dont la lecture est assurée par une badgeuse en début et en fin de journée) pour améliorer l'établissement des bulletins de paie a été jugée inadaptée et disproportionnée au but recherché.
Le contrôle des sacs personnels des salariés est toléré notamment lorsque des vols répétés sont constatés dans l'entreprise, mais l'employeur doit d'abord, sauf circonstances exceptionnelles (alerte à la bombe, par exemple), demander l'accord des intéressés et les avertir qu'ils peuvent s'y opposer ou exiger la présence d'un témoin. A défaut, l'employeur ne peut pas se prévaloir du résultat de ses investigations. L'employeur peut en revanche librement contrôler le contenu du coffre-fort mis à la disposition d'un salarié, même hors sa présence, si ce coffre-fort est destiné à un usage exclusivement professionnel.
L'employeur qui met en oeuvre un dispositif de contrôle ou de surveillance sans en informer les salariés risque en premier lieu des sanctions pénales. Enregistrer clandestinement les conversations téléphoniques des salariés ou les filmer à leur insu est constitutif du délit d'atteinte à la vie privée. Lire sans le consentement des salariés leurs courriers strictement personnels est une violation du secret des correspondances.
Tout enregistrement d'images ou de paroles à l'insu des salariés constitue un mode de preuve illicite et les fautes éventuellement découvertes par ce moyen ne pourront être retenues. Ainsi, une vendeuse a pu obtenir des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors que les faits qui lui étaient reprochés n'étaient pas contestés. Mais l'employeur s'était fondé sur un enregistrement réalisé au moyen d'une caméra vidéo dissimulée, ce qui en faisait un mode de preuve illicite.
Les documents détenus par le salarié sur son lieu de travail, sous forme papier ou informatique, et les messages écrits envoyés ou reçus à partir de matériel mis à disposition de l'employeur (mails et SMS) sont présumés avoir un caractère professionnel : il peuvent être librement consultés par l'employeur hors la présence du salarié et utilisés ensuite dans une procédure disciplinaire. Il en va autrement en cas de disposition contraire du règlement intérieur, ou pour les documents, fichiers ou messages clairement identifiés comme « personnels » (tel n'est pas le cas d'un fichier nommé du prénom du salarié, intitulé « mes documents » ou contenu sur une clé USB appartenant au salarié connectée à son ordinateur professionnel). Sauf risque ou événement particulier, un employeur qui consulte des documents ou messages intitulés « personnels » hors la présence du salarié ne pourra pas se prévaloir de leur contenu pour licencier ce salarié. S'il soupçonne un salarié d'avoir un comportement déloyal, l'employeur doit s'adresser au juge qui pourra notamment autoriser un huissier à accéder à l'ordinateur ou au téléphone du salarié.
L'employeur peut librement contrôler les connexions Internet du salarié durant son temps de travail en recherchant, y compris à l'insu du salarié, l'historique des connexions enregistrées sur le disque dur de son ordinateur.
La surveillance visuelle d'un salarié par son supérieur, sans information préalable de l'intéressé, est un mode de preuve licite à condition que l'employeur ne mette pas en oeuvre des procédés déloyaux. Il y a déloyauté, par exemple, lorsque, pour établir des détournements de fonds, l'huissier missionné par l'employeur demande à de faux clients d'effectuer des achats en espèces et contrôle en fin de journée la caisse.
Si vous découvrez l'existence dans l'entreprise de moyens de surveillance clandestins ou d'une atteinte excessive à vos libertés individuelles, vous pouvez contacter les représentants du personnel et en particulier les délégués du personnel. Ceux-ci disposent d'un droit d'alerte qui leur permet de saisir immédiatement l'employeur. Si celui-ci refuse de prendre les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation, les délégués saisissent le conseil de prud'hommes qui peut ordonner en référé (c'est-à-dire selon la procédure d'urgence) le retrait du système de surveillance.
Vous pouvez aussi alerter l'inspecteur du travail, mais celui-ci n'a pas de pouvoir particulier en la matière.
Par ailleurs, s'il s'agit d'un système informatisé et nominatif, il est possible d'adresser une réclamation à la Cnil par courrier simple (8, rue Vivienne, CS 30223, 75083 Paris Cedex 02 - Tél. : 01 53 73 22 22 - www.cnil.fr). Dans la plupart des cas, la Cnil tente d'obtenir une solution amiable, mais elle peut aussi saisir le parquet pour des poursuites pénales.
Enfin, vous pouvez choisir de porter directement plainte contre l'employeur pour atteinte à la vie privée ou violation du secret des correspondances.
Certaines entreprises ont mis en place un dispositif d'alerte éthique : les salariés sont incités à signaler les comportements fautifs de leurs collègues ou des dirigeants de l'entreprise susceptibles de nuire à celle-ci ou d'engager sa responsabilité. Ce dispositif, comme les autres moyens de contrôle, doit faire l'objet d'une information du comité d'entreprise et des salariés. Il est soumis, selon le cas, à une autorisation de la Cnil ou à une simple déclaration.
Certains tribunaux estiment qu'un dispositif d'alerte n'est pas légal s'il a un domaine trop étendu, engendrant des risques de dénonciations calomnieuses et portant ainsi atteinte aux droits des personnes et aux libertés des salariés.
Il s'agit d'un licenciement pour un ou plusieurs motifs ne tenant pas à la personne du salarié, résultant d'une suppression ou transformation d'emploi, ou d'une modification d'un élément essentiel du contrat de travail refusée par le salarié, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques (C. trav. art. L 1233-2 s.).
Pour licencier pour motif économique, l'employeur doit respecter une double condition :
- justifier de certaines circonstances : difficultés économiques, mutations technologiques ou réorganisation ;
- et démontrer que ces circonstances ont entraîné la suppression, la transformation de l'emploi ou la modification du contrat de travail refusée par le salarié concerné.
Si cette double condition n'est pas remplie, le licenciement sera jugé injustifié.
En ce qui concerne les difficultés économiques, il n'est pas exigé que la situation financière de l'entreprise soit catastrophique. Mais il doit s'agir de réelles difficultés : c'est le cas de résultats déficitaires, d'une baisse constante des commandes, mais pas d'un simple ralentissement des ventes ou de la perte d'un seul marché. Sont injustifiés les licenciements :
- prononcés alors que le résultat d'exploitation est positif ;
- fondés uniquement sur la volonté de réaliser des bénéfices ou des économies.
Les difficultés économiques sont appréciées en fonction de la situation de l'entreprise à la date à laquelle le licenciement a été prononcé. Par ailleurs, les juges tiennent compte de la situation économique de l'ensemble de l'entreprise (et non d'un seul établissement ou magasin). Si l'entreprise appartient à un groupe, ces difficultés sont appréciées au niveau du secteur d'activité de ce groupe, filiales étrangères comprises (Cass. soc. 4-3-2009 no 07-42.381 : RJS 5/09 no 418). Ainsi, un employeur ne saurait invoquer une baisse sensible des marchés, dès lors qu'elle n'entraîne pas de difficultés économiques au niveau de la branche d'activité du groupe dont fait partie l'entreprise.
Que l'entreprise réalise ou non des bénéfices, l'introduction de nouvelles technologies constitue un motif légitime de licenciement si elle provoque la suppression ou la transformation des emplois, ou une modification des contrats de travail. C'est, par exemple, le cas de l'informatisation d'un service, mais pas d'un simple changement de logiciel dans une entreprise déjà habituée à la technologie informatique.
Quant à la réorganisation de l'entreprise, simple réorganisation interne ou restructuration externe avec fusion ou absorption, elle peut justifier le licenciement si elle est décidée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise. Il n'est pas nécessaire que l'entreprise connaisse des difficultés économiques au jour de sa réorganisation ; il suffit que la réorganisation ait pour objet d'éviter des difficultés économiques prévisibles et leurs effets néfastes sur l'emploi (Cass. soc. 27-3-2012 no 11-14.223 : RJS 6/12 no 533).
En revanche, si l'intérêt de la réorganisation n'est pas démontré (absence de concurrence dans le secteur, pas de crainte pour la compétitivité de l'entreprise même future) et que la réorganisation vise seulement à réaliser des profits plus importants ou à rationaliser la gestion ou la production de l'entreprise, le licenciement ne sera pas justifié.
Les salariés peuvent également être licenciés en raison de la fermeture définitive de l'entreprise. Sauf faute ou légèreté blâmable de l'employeur (par exemple, fermeture d'une filiale dans le seul but d'améliorer la rentabilité du groupe), c'est un motif économique de licenciement quelles qu'en soient les raisons : difficultés économiques, restructuration, mais aussi âge ou état de santé de l'employeur, destruction totale des locaux et des stocks à la suite d'un incendie ou encore non-renouvellement d'un bail commercial.
Lorsque la faillite d'une entreprise appartenant à un groupe a été provoquée par une faute de gestion de la maison mère, les salariés licenciés peuvent lui demander réparation (Cass. soc. 8-7-2014 no 13-15.573 : RJS 10/14 no 676).
SavoirEt la délocalisation ? Il y a bien suppression d'emplois en cas de fermeture d'un établissement et de transfert de son activité sur d'autres sites, notamment à l'étranger, dans un milieu différent. Mais les licenciements économiques ne sont justifiés que si cette délocalisation est décidée dans l'intérêt de l'entreprise, par exemple pour sauvegarder sa compétitivité dans un marché où de nouveaux concurrents sont apparus. Tel n'est pas le cas si elle est justifiée par les incitations financières et fiscales offertes par le pays d'accueil et vise à augmenter les bénéfices de la société.
Depuis le 1er avril 2014, les entreprises comprenant au moins 1 000 salariés doivent rechercher un repreneur avant de fermer un établissement et d'engager une procédure de licenciement collectif (C. trav. art. L 1233-57-9).
Deuxième condition : le licenciement n'est en principe justifié que s'il y a bien une suppression ou une transformation d'emploi, ou encore en cas de refus d'une modification d'un élément essentiel du contrat de travail.
La suppression d'emploi suppose que le salarié ne soit pas remplacé. Ainsi, lorsque l'entreprise procède à des licenciements économiques, puis, pour les mêmes emplois, recrute des salariés sous contrat à durée déterminée, les licenciements sont injustifiés (Cass. soc. 16-10-1997 no 95-41.318 : RJS 12/97 no 1348).
Toutefois, une suppression d'emploi n'implique pas nécessairement :
- une réduction globale de l'effectif ; l'employeur ne se met pas en faute s'il recrute de nouveaux salariés pour occuper des postes différents de ceux qui ont été supprimés ;
- la disparition des tâches confiées au salarié licencié, celles-ci pouvant être réparties entre d'autres salariés de l'entreprise ou externalisées.
Il peut arriver aussi que le licenciement ne touche pas le salarié dont le poste est supprimé, mais un autre salarié, dont les fonctions sont transférées au premier. Cette décision est valable dès lors qu'elle a été prise en application des critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements.
Même s'il n'y a pas à proprement parler suppression d'emploi, le licenciement peut être justifié s'il est la conséquence d'une transformation d'emploi, c'est-à-dire d'un changement de nature de l'emploi. Par exemple, un changement d'activité exigeant de nouvelles connaissances peut nécessiter la transformation des emplois et provoquer les licenciements économiques des salariés ne parvenant pas à s'adapter aux nouvelles exigences de leur poste.
Le licenciement économique peut être justifié par le refus du salarié d'accepter une modification d'un élément essentiel de son contrat de travail, par exemple une réduction d'horaire, une baisse de salaire ou un changement de qualification. Il peut y avoir là motif légitime de licencier le salarié si la modification est décidée en raison des difficultés de l'entreprise, si elle résulte d'un accord de maintien dans l'emploi (C. trav. art. L 5125-2) ou d'une réorganisation destinée à maintenir sa compétitivité face à la concurrence.
De la même façon, le refus de se plier à un accord de mobilité interne ouvre à l'employeur le droit de licencier son salarié pour motif économique (C. trav. art. L 2242-23). Un tel accord, issu de négociations menées au sein de chaque entreprise, permet à l'employeur d'imposer la mobilité géographique ou professionnelle des salariés dès lors que sont prévues des mesures d'accompagnement (formation et aides financières notamment).
Avant le licenciement, l'employeur a une double obligation (C. trav. art. L 1233-4) :
- tenter de reclasser le salarié dans un poste correspondant à sa catégorie professionnelle et assorti d'une rémunération équivalente. S'il n'existe pas d'emploi disponible de même catégorie, le reclassement sur un emploi de catégorie inférieure (et donc moins bien rémunéré) peut être envisagé si le salarié l'accepte expressément ;
- assurer, le cas échéant, l'adaptation et la formation du salarié, étant précisé que cette obligation se limite aux formations complémentaires de courte durée ; elle n'impose pas la délivrance d'une formation longue ou qualifiante.
Le licenciement ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés par l'employeur et que le reclassement du salarié n'a pas pu être opéré. Si l'employeur néglige ces obligations, le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, même si le motif économique à l'origine du licenciement est valable. Le défaut de formation autorise aussi l'attribution de dommages et intérêts spécifiques
De son côté, le salarié n'a pas l'obligation d'accepter les propositions de reclassement qui lui sont faites. Les tribunaux considèrent qu'un salarié ne commet pas de faute en refusant ces propositions.
A noter que l'employeur pourrait être dispensé de rechercher un reclassement lorsque le licenciement est justifié par le refus d'appliquer un accord de maintien dans l'emploi (Projet de loi pour la croissance et l'activité dit projet de loi « Macron » art. 87 D, tel qu'adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 18-6-2015).
L'employeur doit chercher un reclassement pour le salarié dans l'ensemble de l'entreprise, y compris les établissements situés dans d'autres régions et, le cas échéant, à l'intérieur du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent la permutation de tout ou partie du personnel.
L'employeur peut proposer au salarié un reclassement dans une entreprise du groupe située à l'étranger. Mais il doit au préalable lui demander s'il accepte de recevoir de telles offres et sous quelles restrictions éventuelles, notamment en matière de rémunération et de localisation (C. trav. art. L 1233-4-1). Le salarié a six jours pour répondre, son silence valant refus. Même s'il accepte le principe d'un reclassement à l'étranger, le salarié reste libre ensuite de refuser les offres qui lui sont proposées. Ces règles devraient être modifiées pour mettre à l'initiative du salarié la recherche du reclassement à l'étranger : à moins que celui-ci n'ait manifesté sa volonté de recevoir des offres sur des postes situés à l'étranger, l'obligation de reclassement se limiterait au territoire national (Projet de loi pour la croissance et l'activité dit projet de loi « Macron » art. 100, définitivement adopté par le Parlement).
L'employeur n'est pas tenu de rechercher des reclassements extérieurs à l'entreprise ou au groupe. Mais il doit respecter les obligations qui peuvent lui être imposées en ce sens par la convention collective. De même, il est lié par son engagement de proposer plusieurs offres valables d'emploi aux salariés menacés de licenciement économique (Cass. soc. 30-9-2013 no 12-13.439 : RJS 12/13 no 796).
En tout état de cause, l'employeur doit faire des propositions individualisées à chaque salarié concerné. Il ne peut pas se contenter de diffuser la liste des postes disponibles au sein du groupe sur son site intranet ou de proposer les services d'un bureau de placement.
Les salariés concernés sont prioritaires sur les postes disponibles, y compris par rapport aux autres salariés de l'entreprise dont le licenciement n'est pas envisagé, aux anciens salariés licenciés bénéficiant de la priorité de réembauche ou aux salariés d'autres sociétés du groupe que l'on cherche à reclasser. Ils ne peuvent pas être mis en concurrence avec des candidats extérieurs.
En cas de licenciement individuel comme de licenciement collectif, l'employeur choisit le ou les salariés à licencier selon les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements (C. trav. art. L 1233-5 s.). Ces critères, applicables par catégorie de personnels, sont prévus par la convention collective ou, à défaut, fixés par l'employeur en concertation avec les représentants du personnel. Il doit au minimum s'agir des critères fixés par le Code du travail, notamment les charges de famille, l'ancienneté, l'âge et les qualités professionnelles des salariés. Liberté est reconnue à l'employeur d'ajouter d'autres critères ainsi que de privilégier tel ou tel critère à condition, cependant, d'avoir pris en compte la totalité de ceux qu'il doit respecter.
Si vous voulez connaître les critères qui ont conduit l'employeur à vous licencier, vous pouvez lui en faire la demande par lettre, que vous lui remettez contre décharge au plus tard dans les dix jours qui suivent votre départ. Rien ne vous empêche de lui adresser un courrier recommandé avec avis de réception si vous avez déjà quitté l'entreprise.
Cette lettre peut être rédigée selon le modèle suivant : « Vous m'avez notifié le 6 mai 2015 votre décision de me licencier pour un motif économique.
En application de l'article L 1233-17 du Code du travail (ou L 1233-43 si licenciement de 10 salariés ou plus sur une période de 30 jours), je vous prie de bien vouloir me faire connaître les critères que vous avez retenus pour fixer l'ordre des licenciements. »
L'employeur doit vous fournir une réponse dans les dix jours suivant votre demande. Il peut le faire par simple lettre remise contre décharge.
Vous pouvez contester devant le juge prud'homal l'application qui a été faite de ces critères. C'est alors à l'employeur de justifier son choix. S'il s'avère que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements, vous pourrez obtenir des dommages-intérêts.
La procédure de licenciement d'un seul salarié est presque la même que celle suivie pour un licenciement pour motif personnel. A noter que les licenciements de plusieurs salariés refusant de se plier à un accord de mobilité interne ou à un accord de maintien dans l'emploi sont menés comme des licenciements individuels.
Lorsque l'employeur n'est pas en mesure de reclasser le salarié, il le convoque pour un entretien préalable. Seules différences avec l'entretien en vue d'un licenciement pour motif personnel :
- l'employeur doit informer les salariés de la possibilité de bénéficier d'aides au reclassement ;
- le temps de réflexion entre l'entretien et l'envoi de la lettre de licenciement est de sept jours ouvrables (15 jours si le salarié a le statut de cadre).
La lettre de licenciement doit mentionner :
- la décision de licencier le salarié ;
- les motifs du licenciement, l'absence de motifs dans la lettre ou leur imprécision (par exemple, la mention d'une suppression de poste sans indication sur les raisons de cette suppression) étant assimilée à une absence de motif du licenciement ;
- l'existence de la priorité de réembauche ;
- les aides dont peut bénéficier le salarié pour retrouver un emploi ;
- le délai offert au salarié pour contester la régularité du licenciement, à savoir 12 mois (faute de quoi le salarié a deux ans pour agir) ;
- éventuellement, la fin du délai de réflexion imparti pour le contrat de sécurisation professionnelle.
Des formalités supplémentaires doivent être accomplies lorsque l'employeur licencie pour motif économique plusieurs salariés, simultanément ou sur une même période de 30 jours (hors application d'un accord de mobilité interne ou de maintien dans l'emploi). Les règles diffèrent selon le nombre de personnes licenciées et l'effectif de l'entreprise.
Lorsque le licenciement collectif touche de deux à neuf salariés, l'employeur doit consulter les représentants du personnel sur son projet, organiser les entretiens préalables puis notifier le licenciement à chaque salarié concerné en respectant le temps de réflexion de sept jours, y compris pour les cadres. L'administration est également informée des licenciements effectués.
S'il s'agit d'un « grand » licenciement collectif, concernant au moins dix salariés sur une période de 30 jours, la procédure est plus complexe. Elle varie selon que l'entreprise compte moins de 50 salariés ou au moins 50 salariés, l'administration devant valider le projet de licenciement dans tous les cas. Dans les entreprises d'au moins 50 salariés, des négociations avec les syndicats ou les délégués du personnel doivent avoir lieu (C. trav. art. L 1233-24-1 s.). Cette procédure n'est pas étudiée dans le cadre du présent ouvrage : le salarié pourra prendre contact avec les représentants du personnel ou l'inspecteur du travail s'il souhaite en connaître les différentes étapes. Attention : l'employeur n'a pas à mener d'entretiens individuels ; une information est dispensée aux salariés sur les aides au reclassement à l'issue de la dernière réunion des représentants du personnel (comité d'entreprise ou délégués du personnel).
S'il emploie au moins 50 salariés et envisage de licencier au moins 10 salariés sur 30 jours, l'employeur doit prévoir un ensemble de mesures permettant d'éviter des licenciements ou d'en limiter le nombre et de faciliter le reclassement des salariés licenciés : c'est le plan de sauvegarde de l'emploi (C. trav. art. L 1233-61 s.). Le plan peut notamment prévoir des incitations au départ volontaire, des formations, des mesures de reclassement interne, une réduction du temps de travail, le développement d'activités nouvelles, des aides à la mobilité géographique ou à la création d'entreprise.
En l'absence de plan ou en cas d'insuffisance des mesures proposées, le licenciement est en principe nul et vous permet de demander votre réintégration, ainsi que les salaires perdus entre la date de la rupture et celle de la réintégration, diminués des revenus éventuellement perçus pendant cette période (allocations de chômage, rémunérations versées par un nouvel employeur, etc.). Si vous ne souhaitez pas rester dans l'entreprise ou si votre réintégration est impossible (par exemple en cas de fermeture de l'établissement ou d'absence d'emploi disponible), vous pouvez obtenir une indemnité au moins égale aux salaires des 12 derniers mois à condition d'avoir au moins deux ans d'ancienneté (à défaut, votre indemnité sera calculée en fonction de votre préjudice).
Une exception cependant à la nullité du licenciement : l'insuffisance du plan établi lors d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire de l'employeur prive simplement de cause réelle et sérieuse les licenciements économiques prononcés. Dans ce cas, vous ne pouvez pas demander votre réintégration mais uniquement des dommages et intérêts.
Sauf en cas d'adhésion à un contrat de sécurisation professionnelle, un congé de reclassement ou un congé de mobilité, le salarié est tenu d'exécuter son préavis : les règles décrites no 56710 s. pour le licenciement pour motif personnel sont applicables au licenciement économique. Le préavis doit être respecté par l'employeur même en cas de fermeture de l'entreprise.
Une exception, toutefois : le salarié est dispensé de son préavis s'il est engagé chez un nouvel employeur. Cette faveur concerne la grande majorité des salariés, à l'exception, notamment, du secteur agricole et des salariés des professions libérales.
Dans les entreprises de moins de 1 000 salariés ou celles qui sont en redressement ou en liquidation judiciaire quelle que soit leur taille, les personnes dont le licenciement économique est envisagé (individuel et collectif) et qui justifient d'au moins un an d'ancienneté peuvent bénéficier d'un contrat de sécurisation professionnelle (CSP). Celles justifiant d'une ancienneté inférieure peuvent, sous certaines conditions, adhérer au dispositif mais perçoivent une allocation spécifique de sécurisation moindre. Ce dispositif, d'une durée maximale de 12 mois, permet une alternance de mesures d'accompagnement (bilan de compétences, etc.), de phases de formation et de périodes travaillées au sein d'entreprises ou d'organismes publics (C. trav. art. L 1233-65 s. ; Convention Unédic du 26-1-2015). Sauf renouvellement, cette aide ne pourra plus être proposée aux salariés licenciés après le 31 décembre 2016.
L'employeur doit en faire la proposition en remettant au salarié, au moment de l'entretien préalable, ou à l'issue de la dernière réunion des représentants du personnel lorsque l'entretien n'est pas obligatoire, et contre récépissé, le dossier qu'il se sera préalablement procuré auprès de Pôle emploi. Le salarié dispose d'un délai de réflexion de 21 jours, son silence valant refus.
Le salarié qui refuse une telle convention est licencié pour motif économique, effectue son préavis et perçoit les indemnités prévues dans ce cas.
S'il l'accepte, le contrat de travail est rompu d'un commun accord avec l'employeur à l'issue du délai de 21 jours. Son acceptation vaut renonciation aux postes de reclassement qui ont pu lui être proposés. L'intéressé peut prétendre à l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ; en revanche, il perd le bénéfice de l'indemnité de préavis (l'employeur verse le montant correspondant, charges sociales comprises au titre du préavis, à Pôle emploi). Si toutefois le montant conventionnel de l'indemnité de préavis est supérieur à 3 mois, cet excédent est versé au salarié.
L'acceptation par le salarié du CSP ne lui interdit pas de contester le motif économique de la rupture et de réclamer, si ce motif n'est pas reconnu, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'indemnité compensatrice de préavis non perçue. Les tribunaux imposent d'ailleurs à l'employeur la remise au salarié, au plus tard lors de son acceptation du contrat, d'un document écrit et personnel lui précisant le motif économique (Cass. soc. 17-3-2015 no 13-26.941 : RJS 6/15 no 430). De même, il bénéficie de la priorité de réembauche (no 56805).
Pendant l'exécution du CSP, le salarié est placé sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle. Il perçoit de Pôle emploi une allocation spécifique de sécurisation lui garantissant 75 % de son salaire brut moyen des douze derniers mois. Le montant de cette allocation ne peut pas être inférieur au montant de l'allocation chômage que le salarié aurait touchée s'il avait refusé le CSP. Pendant les périodes de travail, effectuées dans le cadre de CDD ou de contrats de travail temporaire, le salarié perçoit la rémunération correspondant au poste occupé, éventuellement complétée par une indemnité différentielle de reclassement. S'il retrouve une activité professionnelle durant au moins trois mois, il cesse de bénéficier du CSP. Lorsque la durée de cet emploi est au moins égale à six mois et que le retour à l'emploi a lieu avant la fin du 10e mois d'exécution du CSP, le bénéficiaire peut demander le versement d'une prime de reclassement équivalente à 50 % du reliquat de ses droits à l'allocation spécifique de sécurisation.
A l'expiration du CSP, le salarié bénéficie immédiatement de l'allocation chômage, sans délai d'attente ni différé d'indemnisation, la durée de versement étant cependant réduite de la durée de la convention.
Le congé de reclassement peut être proposé au sein des entreprises d'au moins 1 000 salariés (C. trav. art. L 1233-71 s.). Chaque salarié doit être informé de la possibilité d'en bénéficier lors de l'entretien préalable (ou à défaut d'entretien, dans le cas des « grands » licenciements collectifs, à l'issue de la dernière réunion de consultation des représentants du personnel). L'employeur lui en fait ensuite la proposition par écrit, dans la lettre de licenciement, en lui précisant qu'il a huit jours à partir de la réception de cette lettre pour accepter, son silence valant refus.
Si le salarié accepte cette proposition, il est dispensé de préavis. Pendant le congé de reclassement, qui peut durer de quatre à douze mois (la fin du préavis étant reportée jusqu'au terme du congé), le salarié bénéficie d'une formation et d'une aide dans ses démarches pour retrouver un emploi. Il perçoit une rémunération : son plein salaire pendant la période correspondant à la durée du préavis puis, lorsque celle-ci est écoulée, au moins l'équivalent de 65 % des salaires bruts moyens des 12 derniers mois, avec un minimum fixé à 85 % du Smic. Il est autorisé à effectuer des périodes de travail durant lesquelles le congé de reclassement est suspendu. A leur terme, celui-ci reprend et le terme du congé est reporté d'autant.
Si le salarié retrouve un emploi pendant son congé, il en informe l'employeur, avant l'embauche, par LRAR ou lettre remise en main propre contre décharge. Il précise la date à laquelle prend effet son embauche.
A l'expiration du congé, le salarié perçoit l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ainsi que l'allocation de retour à l'emploi dans les conditions de droit commun.
SavoirLe congé de reclassement débute par un bilan d'évaluation pour permettre au salarié de définir un projet professionnel et ses besoins, notamment en termes de formation. A partir de là, les prestations de la cellule d'accompagnement des démarches de recherche d'emploi sont définies ainsi que les actions de formation ou de validation des acquis de son expérience et le nom des organismes prestataires de ces actions. L'employeur finance l'ensemble de ces actions.
Le congé de mobilité, proposé dans les entreprises d'au moins 1 000 salariés, est une formule proche de la précédente avec, cependant, trois différences majeures :
- sa mise en oeuvre doit être prévue par un accord sur la gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences. A défaut, l'employeur est dispensé de le proposer ;
- aucune durée, minimale ou maximale, n'est fixée par la loi pour ce congé ;
- le salarié peut exercer durant ce congé une activité professionnelle chez son employeur ou auprès d'un autre employeur dans des conditions plus souples.
Les modalités pratiques (information, proposition, délai et forme de la réponse) sont définies par l'accord.
Si le salarié refuse la proposition, l'employeur doit lui proposer un congé de reclassement (qu'il peut aussi refuser, voir ci-dessus).
S'il accepte la proposition, le contrat de travail est réputé rompu d'un commun accord. Le salarié a droit aux indemnités légales et conventionnelles dues en cas de licenciement pour motif économique, à l'exception du préavis dont il est dispensé.
Durant le congé, peuvent alterner des mesures d'accompagnement (bilan de compétences, actions de validation des acquis, entretiens), des périodes de formation et des périodes de travail. Ces périodes de travail peuvent être effectuées sous contrat à durée indéterminée ou à durée déterminée (dans ce cas, le congé est suspendu pour reprendre à la fin du CDD).
Pendant la période correspondant au préavis, le salarié perçoit normalement son salaire. Au-delà, sa rémunération est au moins équivalente à 65 % des salaires bruts moyens des 12 derniers mois, avec un minimum fixé à 85 % du Smic. Pendant les périodes de travail, l'intéressé doit percevoir le salaire correspondant à l'emploi qu'il occupe.
A l'expiration du congé, le salarié perçoit l'allocation chômage dans les conditions de droit commun.
Tout salarié licencié pour motif économique bénéficie pendant un an à partir de la fin du préavis d'une priorité pour être réembauché dans l'entreprise, en CDI ou CDD, dans tout emploi disponible (ce qui exclut les emplois pourvus en interne ou ceux temporairement vacants suite à une absence) correspondant à sa qualification.
Seule condition : il faut le demander par écrit, de préférence par lettre recommandée avec avis de réception, dans les 12 mois qui suivent la fin du préavis (ou la fin du congé de reclassement si celui-ci excède la durée du préavis). Ou encore répondre positivement à l'employeur qui l'aura proposé de son propre chef (Cass. soc. 11-4-2012 no 11-11.037 : RJS 6/12 no 534). Le salarié est par la suite informé par l'employeur des emplois à pourvoir. S'il postule pour ces postes, il bénéficie d'une priorité sur les autres candidats. Lorsque plusieurs salariés réembauchés entrent en concurrence sur un poste, aucune règle de priorité n'existe : c'est à l'employeur de choisir le salarié qu'il souhaite réembaucher.
Si l'employeur ne respecte pas cette obligation, le salarié a droit à une indemnité au moins égale à deux mois de salaire (ou calculée en fonction du préjudice subi pour les salariés ayant moins de deux ans d'ancienneté ou employés dans une entreprise de moins de 11 salariés, seuil qui pourrait être porté à 20 salariés après l'adoption du projet de loi pour la croissance et l'activité, dite loi « Macron », tel qu'adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 18-6-2015).
Clémentine Dubois
42 rue de Villiers
92300 Levallois-Perret
SARL Agruma
9 rue de La Fontaine
95130 Franconville
A Levallois-Perret, le 5 juin 2015
Objet : demande de réembauche
Monsieur,
J'ai été licencié pour motif économique le 21 mai 2015. Je vous informe que je souhaite bénéficier de la priorité de réembauche prévue par l'article L 1233-45 du Code du travail.
Vous voudrez bien me tenir informé de tout emploi devenu disponible dans ma qualification.
Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées.
Clémentine Dubois
Elle est due quel que soit le motif du licenciement, économique ou personnel, à la seule exception de la faute grave ou lourde. Mais il faut que le salarié ait au moins un an d'ancienneté continue dans l'entreprise. Pour calculer cette ancienneté, qui s'apprécie à la date de l'envoi de la lettre de licenciement, on retient certaines périodes de suspension du contrat (notamment accident du travail et congé maternité) alors que d'autres comme la maladie non professionnelle sont exclues du décompte.
Son montant est indépendant du motif du licenciement : il est égal à 1/5e de mois de salaire par année d'ancienneté les 10 premières années et à 1/3 de mois de salaire pour chaque année suivante (C. trav. art. R 1234-2).
Par exemple, un salarié, dont la rémunération est de 2 000 € par mois, licencié après 13 ans de présence, percevra une indemnité de licenciement égale à (2 000 € × 1/5e × 10) + (2 000 € × 1/3 × 3) = 6 000 €.
Quelques précisions sur les modalités de calcul de l'indemnité légale de licenciement :
- le salaire pris en compte est le salaire brut moyen des 12 derniers mois ou, si la formule est plus avantageuse pour le salarié, le salaire brut moyen des trois derniers mois ;
- entrent dans ce calcul les primes et gratifications, même exceptionnelles. Mais lorsqu'on retient comme base de calcul de l'indemnité la rémunération moyenne des trois derniers mois, toute prime ou gratification annuelle qui aura été versée pendant cette période n'est prise en compte que proportionnellement à cette durée ;
- pour le nombre d'années de service, on retient les années complètes, mais aussi les années incomplètes, proportionnellement à leur durée. Si un salarié embauché le 1er juin 2007 quitte l'entreprise le 1er décembre 2015, son indemnité de licenciement est calculée sur la base de : 8 ans + 6/12 = 8 années et demie d'ancienneté ;
- l'ancienneté s'apprécie au jour où le préavis prend fin, même en cas de dispense. Le salarié employé de façon continue en CDD puis en CDI voit l'ancienneté qu'il a acquise dans le cadre du CDD prise en compte.
Lorsqu'un salarié a été employé successivement à temps complet et à temps partiel dans la même entreprise, l'indemnité légale est calculée proportionnellement.
Exemple d'un salarié ayant travaillé à mi-temps pendant deux ans payé 1 000 €, puis à temps complet pendant deux autres années payé 2 000 €. Son indemnité de licenciement est égale à (1 000 € × 1/5 × 2) + (2 000 € × 1/5 × 2) = 1 200 €.
Souvent, la convention collective applicable dans l'entreprise prévoit une indemnité de licenciement différente de l'indemnité légale. Cette indemnité n'est pas versée en plus de l'indemnité légale de licenciement, mais à sa place si elle est plus avantageuse pour le salarié (montant supérieur et/ou absence de condition d'ancienneté).
Les mêmes règles s'appliquent à l'indemnité éventuellement prévue dans le contrat de travail : seule doit être versée l'indemnité la plus avantageuse pour le salarié.
Les plans de sauvegarde de l'emploi ou plans de suppression d'emplois prévoient souvent des indemnités additionnelles de licenciement ou des aides au départ volontaire.
Sur les clauses de garantie d'emploi et les golden parachutes, voir no 55067.
Elle est due au salarié dispensé d'exécuter son préavis par l'employeur (mais non si c'est le salarié qui demande à en être dispensé).
Le montant de l'indemnité de préavis est égal aux salaires bruts et autres avantages que le salarié aurait reçus s'il avait travaillé (Cass. soc. 17-12-1987 no 85-42.089). L'indemnité doit donc être calculée en tenant compte :
- de la durée de travail fixée dans le contrat de travail du salarié ;
- des jours de RTT dont le salarié aurait bénéficié s'il avait effectué son préavis ;
- des primes et indemnités dues ou versées aux salariés de l'entreprise pendant la période du préavis, y compris celles liées à une condition de présence, à l'exclusion des remboursements de frais.
Elle est due à tout salarié licencié qui quitte l'entreprise sans avoir pris tous les congés auxquels il avait droit (C. trav. art. L 3141-26). Il en est ainsi quel que soit le motif du licenciement, sauf si le salarié a commis une faute lourde.
Il faut tenir compte de tous les jours acquis au cours de la période de référence passée et aussi de ceux correspondant à la période de référence en cours. Par exemple, si un salarié licencié quitte l'entreprise le 1er octobre 2015, il a droit à une indemnité correspondant au reliquat des jours de congés non pris acquis sur la période 1er juin 2014-31 mai 2015, mais aussi aux jours dus au titre de la période 1er juin 2015-1er octobre 2015.
L'indemnité compensatrice de congés payés est calculée comme l'indemnité de congés payés : soit 1/10e de la rémunération totale perçue par le salarié au cours de la période de référence, soit le salaire qu'il aurait perçu s'il avait travaillé. C'est la méthode de calcul la plus avantageuse pour le salarié qui est retenue.
Si le salarié est lié par une clause de non-concurrence, il a droit lors de son départ à l'indemnité compensatrice prévue par le contrat de travail ou la convention collective. Toutefois, cette indemnité est la plupart du temps versée de façon échelonnée tout au long de la période d'interdiction.
Si l'employeur ne règle pas les indemnités de rupture en même temps que la dernière paie, le salarié peut le sommer de les verser en lui adressant une lettre recommandée avec avis de réception qui peut être rédigée selon le modèle suivant :
« Vous m'avez notifié le 17 avril 2015 mon licenciement pour motif personnel, avec un préavis de deux mois et départ effectif de l'entreprise le 17 juin 2015. Mais à ce jour, vous ne m'avez toujours pas réglé l'indemnité de licenciement à laquelle j'ai droit. Je vous demande de me verser celle-ci dans les plus brefs délais. A défaut, je saisirai le conseil de prud'hommes. »
Si cette démarche se révèle infructueuse, il est possible de saisir le conseil de prud'hommes dans le cadre d'une procédure de référé (c'est-à-dire la procédure d'urgence).
Les indemnités versées en cas de licenciement sont-elles soumises aux charges sociales, à la CSG et à la CRDS ? Sont-elles imposables à l'impôt sur le revenu ? Tout dépend de leur nature. Certaines sont assimilées à un salaire : elles sont donc soumises à cotisations sociales et imposables. D'autres sont considérées comme des dommages-intérêts : elles sont alors exonérées de toutes cotisations et impôts, mais sous certaines limites.
Voici les solutions applicables à chaque indemnité.
Sur le régime fiscal et social de l'indemnité versée en application d'une transaction, voir no 56890. Sur l'indemnité de non-concurrence, voir nos 55072
Nom de l'indemnité |
Nature |
Cotisations sociales |
Impôt sur le revenu |
CSG et CRDS |
---|---|---|---|---|
Indemnité de licenciement ou de départ volontaire dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi |
Dommages-intérêts |
Exonération dans la limite de 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale en vigueur à la date du versement (1) |
Exonération totale |
Exonération à hauteur du montant prévu par la convention collective de branche, l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi, dans les plafonds applicables aux cotisations sociales (1) |
Indemnité de licenciement hors plan de sauvegarde de l'emploi |
Dommages-intérêts |
Exonération dans la limite de 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale en vigueur à la date du versement, à hauteur du plus élevé des trois montants suivants : - montant de l'indemnité prévu par la convention collective de branche, par l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi ; - 2 fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail ; - 50 % du montant de l'indemnité versée |
Exonération pour les indemnités versées en 2015 dans la limite de la plus élevée des 3 sommes suivantes (2) : - montant fixé par la convention de branche, l'accord professionnel ou interprofessionnel ou à défaut par la loi ; - 50 % de l'indemnité versée dans la limite de 228 240 € ; - double de la rémunération brute de l'année civile précédente, dans la limite de 228 240 € |
Idem |
Indemnité compensatrice de préavis |
Salaire |
Oui |
Oui |
Oui |
Indemnité compensatrice de congés payés |
Salaire |
Oui |
Oui |
Oui |
Dommages-intérêts pour licenciement injustifié, irrégulier ou nul (3) |
Dommages-intérêts |
Exonération dans la limite de 76 080 € pour des dommages-intérêts versés en 2015 |
Exonération totale |
Exonération, sous certaines limites (4) |
(1) Les indemnités dont le montant dépasse 10 fois le plafond annuel de la sécurité sociale en vigueur à la date du versement (soit 380 400 € en 2015) sont intégralement assujetties aux cotisations et contributions précitées. (2) La fraction imposable peut bénéficier du système du quotient quel que soit son montant. (3) Sont visés ici les dommages-intérêts accordés aux salariés ayant au moins 2 ans d'ancienneté dans une entreprise d'au moins 11 salariés ainsi que l'indemnité accordée en cas de licenciement abusif aux salariés ayant moins de 2 ans d'ancienneté ou employés dans une entreprise de moins de 11 salariés. (4) Ils sont soumis à la CSG et à la CRDS pour la part dépassant les montants minimaux prévus par la loi (6 mois de salaire pour les employés ayant au moins 2 ans d'ancienneté dans une entreprise de 11 salariés et plus) ou le montant exonéré de cotisations de sécurité sociale s'il est inférieur. |
Avant de quitter l'entreprise, il ne faut pas oublier de réclamer :
- une attestation pour Pôle emploi : celle-ci est nécessaire pour faire valoir ses droits aux allocations de chômage ;
- un certificat de travail, mentionnant les dates d'entrée et de sortie dans l'entreprise, la nature du ou des emplois occupés (qualification et coefficients hiérarchiques) avec les périodes correspondantes ainsi que le maintien de la mutuelle et des garanties prévoyance, c'est-à-dire incapacité, invalidité, décès. Le certificat de travail peut être demandé au salarié par un nouvel employeur qui souhaiterait vérifier qu'il est libéré de son précédent engagement.
L'employeur doit tenir l'attestation Pôle emploi et le certificat de travail à la disposition du salarié dans les locaux de l'entreprise, et il doit adresser une copie de l'attestation à Pôle emploi.
L'employeur qui refuse de délivrer ces deux documents encourt des sanctions pénales et peut également être condamné à verser des dommages et intérêts au salarié.
Lorsqu'un dispositif d'épargne salariale est proposé dans l'entreprise, un livret d'épargne salariale doit être remis ; il récapitule les droits acquis, leurs modalités d'affectation et, le cas échéant, les dates auxquelles ces droits seront disponibles.
Le reçu pour solde de tout compte est un document délivré par l'employeur qui fait l'inventaire des sommes versées lors de la rupture du contrat (C. trav. art. L 1234-20). Etabli en double exemplaire dont l'un est remis au salarié, il doit être daté et signé par les deux parties.
S'il n'a pas assorti sa signature de réserves, le salarié n'a que six mois pour dénoncer le reçu par courrier recommandé. Il doit évoquer expressément les points contestés. A défaut, toute contestation ultérieure des sommes mentionnées sur le reçu sera rejetée. Cet effet libératoire ne vaut que pour les sommes qui y sont mentionnées même si le reçu a été libellé en termes généraux (Cass. soc. 18-12-2013 no 12-24.985 : RJS 3/14).
Il ne joue qu'au profit de l'employeur : si ce dernier constate que l'indemnité de préavis qui a été versée excède ce qui était dû, un remboursement pourra être demandé même une fois les six mois écoulés.
Un reçu pour solde de tout compte est rédigé en ces termes : « Je soussigné, M. Duchêne, salarié de la société Dubois, reconnais avoir reçu 6 403 € de mon employeur correspondant au détail suivant :
- salaire de juin 2015 : 1 524 € ;
- indemnité de congés payés : 1 753 € ;
- indemnité de licenciement : 3 126 €.
Cette somme m'est versée pour solde de tout compte en paiement des salaires, accessoires de salaires, remboursement de frais et indemnités de toute nature dus au titre de l'exécution et de la cessation de mon contrat de travail. »
Passé le délai de six mois après la signature du reçu, M. Duchêne qui constate une erreur dans le calcul de l'indemnité de congés payés ne pourra plus réclamer ce qui ne lui a pas été versé. En revanche, rien ne lui interdit de demander un rappel de salaires pour les mois de janvier et février 2015.
Le salarié peut saisir la justice s'il considère que le licenciement est injustifié ou irrégulier. Le conseil de prud'hommes est, en principe, compétent. Toutefois, pour contester la régularité de la procédure d'un licenciement de plus de 10 salariés mené dans une entreprise d'au moins 50 salariés, il faut saisir le tribunal administratif (C. trav. art. L 1235-7-1).
Le délai pour agir est de deux ans (délai réduit à 12 mois pour les demandes de nullité d'un licenciement économique collectif en raison de l'absence ou l'insuffisance du plan de sauvegarde, ou pour la rupture du contrat après un CSP, sous réserve que la lettre de licenciement ou la proposition de CSP mentionne expressément ce délai). Le délai est porté à cinq ans quand le salarié prétend avoir été victime d'une discrimination ou d'un harcèlement.
Le salarié n'a pas à rapporter la preuve que son licenciement est injustifié. L'employeur n'a pas non plus à prouver le contraire, sauf si le licenciement a été prononcé pour faute grave. C'est au juge de rechercher si les motifs invoqués dans la lettre de licenciement, et seulement eux, sont à la fois réels et sérieux. Il doit tenir compte des éléments fournis par les parties, mais peut aussi ordonner des mesures d'instruction (enquête, convocation de témoins, expertise, etc.). En cas de licenciement pour motif économique, l'employeur doit communiquer au juge tous les éléments qu'il a fournis au comité d'entreprise ou aux délégués du personnel.
Si un doute subsiste, il profite au salarié. Autrement dit, si le juge n'a pas de certitude sur la réalité ou le sérieux du motif invoqué, il doit déclarer le licenciement injustifié.
Le salarié doit produire tous les éléments susceptibles d'appuyer sa réclamation : correspondances avec l'employeur, témoignages écrits de collègues ou de clients (en n'oubliant pas de fournir la photocopie des cartes d'identité de ces personnes). Il est aussi possible de demander à un huissier la retranscription de messages laissés par l'employeur sur son répondeur (Cass. soc. 6-2-2013 no 11-23.738 : RJS 4/13 no 316). Si le salarié s'est fait assister lors de l'entretien préalable par un conseiller extérieur, il peut transmettre aux juges ses déclarations.
La jurisprudence autorise la production de certains documents internes à l'entreprise. Attention tout de même : encourt une condamnation pénale pour vol le salarié qui photocopie, à l'insu de son employeur, des documents auxquels ses fonctions ne lui permettent pas d'accéder régulièrement et qui ne justifie pas que ces documents lui sont nécessaires pour défendre ses droits.
Lors de la conciliation qui précède l'audience de jugement, et hormis le cas des grands licenciements collectifs, le salarié peut accepter d'abandonner sa contestation en échange du versement, par son employeur, d'une indemnité forfaitaire (C. trav. art. D 1235-21). Cette indemnité s'ajoute aux indemnités légales, conventionnelle ou contractuelle de licenciement.
Son montant est déterminé par référence à un barème indicatif, en fonction de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise. Le régime fiscal et social de l'indemnité forfaitaire est le même que celui applicable à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Ancienneté |
Montant |
---|---|
Inférieure à deux ans |
2 mois de salaire |
De 2 à moins de 8 ans |
4 mois de salaire |
De 8 à moins de 15 ans |
8 mois de salaire |
De 15 à 25 ans |
10 mois de salaire |
Plus de 25 ans |
14 mois de salaire |
L'accord signé lors de la conciliation a les mêmes effets qu'une transaction : il ferme la porte à toute autre action en contestation du licenciement par le salarié.
Si le salarié refuse l'accord proposé par l'employeur ou le bureau de conciliation, l'affaire est portée devant le bureau de jugement.
A supposer qu'il vous donne raison, les pouvoirs du bureau de jugement du conseil de prud'hommes ne seront pas les mêmes selon la nature de l'irrégularité. Voici les conséquences possibles selon que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, irrégulier ou nul.
Conditions du licenciement |
A défaut, le licenciement est |
Conséquences financières |
Réintégration ? |
---|---|---|---|
Motif réel et sérieux |
Dépourvu de cause réelle et sérieuse ou injustifié |
Dommages-intérêts : 6 mois de salaire minimum (1) (2) (4) Dommages-intérêts en cas de préjudice supplémentaire et distinct |
Non |
Peut seulement être proposée | |||
Respect de la procédure |
Irrégulier |
Indemnité : 1 mois de salaire maximum (1) (2) (3) |
Non |
Motifs interdits |
Nul |
Salaires non perçus entre le licenciement et la réintégration Dommages-intérêts en cas de préjudice supplémentaire et distinct |
Oui Si impossible ou pas demandée, indemnité minimale de 6 mois de salaire 12 mois si licenciement économique nul en raison de l'absence ou de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi et si au moins 2 ans d'ancienneté (2) (5) |
(1) Indemnisation à condition que le salarié ait plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise de 11 salariés ou plus. Dans le cas contraire, l'indemnisation est fixée en fonction du préjudice subi. Cette condition pourrait être supprimée (Projet de loi pour la croissance et l'activité dit projet de loi « Macron » art. 87 D, tel qu'adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 18-6-2015). (2) Indemnité cumulable avec les indemnités de préavis, licenciement, congés payés, non-concurrence. (3) En cas de licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse, seule l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est versée. En cas de licenciement nul, l'indemnité est versée mais elle peut être aussi comprise dans l'évaluation du préjudice résultant de la nullité. (4) Le montant de l'indemnité pourrait être défini en référence à un barème obligatoire, en fonction de l'ancienneté du salarié et de l'effectif de l'entreprise, sauf faute de l'employeur d'une particulière gravité (Projet de loi pour la croissance et l'activité dit projet de loi « Macron » art. 87 D, tel qu'adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 18-6-2015). Les indemnités versées seraient par exemple limitées à 3 mois de salaires pour les salariés ayant moins de 2 ans d'ancienneté dans une entreprise de moins de 20 salariés, à 20 mois de salaires pour les salariés ayant au moins 10 ans d'ancienneté dans une entreprise comprenant 20 à 299 salariés. (5) Cette condition d'ancienneté de 2 ans pourrait être supprimée (Projet de loi pour la croissance et l'activité dit projet de loi « Macron » art. 87 D, tel qu'adopté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale le 18-6-2015). |
Le salarié dont le licenciement est jugé « sans cause réelle et sérieuse » n'obtient pas automatiquement sa réintégration. Le juge peut la proposer, mais l'employeur n'est pas obligé de l'accepter (pas plus d'ailleurs que le salarié qui ne la souhaiterait pas).
S'il ne réintègre pas le salarié, l'employeur doit lui verser des dommages-intérêts fixés par les juges à un montant au moins égal au salaire brut des six derniers mois (C. trav. art. L 1235-3). Si le salarié a moins de deux ans d'ancienneté ou si l'entreprise occupe moins de 11 salariés, aucun minimum n'est prévu par la loi et les dommages-intérêts sont fixés en fonction du préjudice subi.
Si le salarié a été licencié pour faute grave et que les juges ne reconnaissent pas la gravité de la faute, l'employeur sera condamné à lui verser l'indemnité de licenciement. Il devra également lui verser une indemnité compensatrice de préavis, même si le salarié n'était pas en mesure d'exécuter son préavis au moment de son licenciement (maladie, accident). La même solution s'applique en cas de faute lourde : si les juges l'écartent, le salarié pourra obtenir les indemnités dont il a été privé (Cass. soc. 21-5-2014 no 13-16.543).
Si l'employeur licencie sans respecter la procédure, le licenciement est irrégulier. Le conseil de prud'hommes peut lui ordonner d'effectuer la formalité qu'il a négligée, mais préfère le plus souvent le condamner à verser au salarié une indemnité dont le montant ne peut dépasser un mois de salaire.
Cette indemnité est réservée aux salariés ayant au moins deux ans d'ancienneté et employés dans une entreprise d'au moins 11 salariés. Si ces conditions ne sont pas réunies, le salarié ne peut prétendre qu'à des dommages-intérêts fixés par les juges en fonction de son préjudice.
Si le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, le salarié ne peut pas cumuler l'indemnité due à ce titre et l'indemnité pour procédure irrégulière (Cass. soc. 12-3-2008 no 06-43.866 : RJS 5/08 no 557).
Peuvent être frappés de nullité les licenciements prononcés à l'encontre du salarié notamment :
- pour des motifs discriminatoires (origine, sexe, moeurs, orientation ou identité sexuelle, situation de famille, nationalité, race, opinions politiques, activités syndicales ou mutualistes, convictions religieuses, apparence physique, patronyme, âge, caractéristiques génétiques, lieu de résidence, état de santé ou handicap sauf inaptitude constatée médicalement, grossesse) ou à la suite d'une action en justice engagée par le salarié s'estimant victime de discrimination ou pour avoir témoigné d'agissements discriminatoires de l'employeur ;
- à la suite du signalement, de bonne foi, de faits dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions et qui seraient constitutifs d'un délit ou d'un crime ou relatifs à un risque grave pour la santé publique ou l'environnement ;
- à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ;
- pour motif économique, en l'absence ou en cas d'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi (sauf lorsque le plan insuffisant est établi lors d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires) ;
- à l'encontre de représentants du personnel ou délégués syndicaux, sans autorisation de l'inspecteur du travail ;
- pendant le congé maternité ou le congé d'adoption, ou avant ou après ceux-ci hors des cas autorisés. Il en est de même pour le père dans les 4 semaines suivant la naissance de son enfant (C. trav. art. L 1225-4-1 créé par la loi 2014-873 du 4-8-2014) ;
- en raison de la participation du salarié à une grève ou pour avoir engagé une action en justice fondée sur l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes ;
- en violation d'une liberté fondamentale, telle celle de témoigner en justice y compris dans un procès opposant l'employeur à un autre salarié (Cass. soc. 29-10-2013 no 12-22.447 : RJS 1/14 no 9) ;
- pour avoir subi ou refusé de subir des agissements constitutifs de harcèlement moral ou sexuel ou pour avoir témoigné de tels agissements. Est également nul le licenciement fondé sur l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail si cette inaptitude découle du harcèlement dont a été victime le salarié.
Lorsque le licenciement est nul, le salarié peut obtenir sa réintégration. Il peut exiger les salaires perdus entre son licenciement et sa réintégration, déduction faite des allocations de chômage ou des salaires perçus d'un autre employeur pendant cette période.
S'il ne demande pas sa réintégration ou si elle est impossible (salarié mis à la retraite, fermeture de l'établissement ou absence d'emploi disponible, par exemple), le salarié a droit, quelles que soient son ancienneté et la taille de l'entreprise :
- aux indemnités de rupture (indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, indemnité compensatrice de préavis) ;
- à une indemnité réparant le préjudice causé par l'absence de réintégration : au moins six mois de salaire en cas de licenciement pour motif personnel ;
- le cas échéant, à une indemnité pour non-respect de la procédure, soit distincte, soit comprise dans l'évaluation du préjudice résultant de la nullité.
Sur l'indemnité spéciale due lorsqu'il s'agit d'une nullité liée à l'absence ou l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, voir no 56782.
Plutôt que d'engager une procédure devant les prud'hommes, le salarié peut avoir intérêt à conclure avec l'employeur une transaction par laquelle il renonce à son action judiciaire moyennant une compensation financière.
La transaction est un accord réglant les conséquences financières du licenciement. Elle doit être distinguée de la rupture conventionnelle qui est un accord conclu entre l'employeur et le salarié pour mettre fin au contrat et qui intervient donc à la place du licenciement.
Pour être valable, la transaction doit être signée une fois la rupture du contrat définitive (Cass. soc. 14-6-2006 no 04-43.123 : RJS 8-9/06 no 943). Elle doit donc être conclue au plus tôt après la réception de la lettre de licenciement par le salarié, mais peut l'être bien plus tard, notamment en cours d'instance prud'homale.
Par ailleurs, pour des raisons de preuve, la transaction doit être écrite, établie en double exemplaire et signée par l'employeur et par le salarié.
Enfin et surtout, elle n'est valable que si elle comporte des concessions réciproques. C'est par exemple le cas d'une transaction par laquelle, en contrepartie de sa renonciation à contester son licenciement, le salarié, à qui il était pourtant reproché une faute grave, se voit proposer, en plus des indemnités de licenciement et de préavis conventionnelles, une indemnité correspondant à quatre mois de salaire. En revanche, n'est pas valable, s'agissant d'un salarié à qui aucune faute grave n'était reprochée, la transaction prévoyant le versement d'une indemnité transactionnelle ne dépassant pas le montant des indemnités de préavis, de licenciement et de congés payés auxquelles avait droit le salarié.
Il faut distinguer les différents éléments qui la constituent. Si elle englobe des éléments à caractère de salaire (rappels de salaire, indemnité compensatrice de congés payés et de préavis, etc.), ceux-ci sont soumis à l'impôt sur le revenu, aux cotisations sociales, ainsi qu'à la CSG et à la CRDS.
En revanche, la part de l'indemnité transactionnelle qui correspond à l'indemnité de licenciement suit le régime de celle-ci en matière d'impôt sur le revenu, de cotisations sociales, de CSG et de CRDS.
L'administration considère que l'indemnité versée à un salarié licencié pour faute grave ou lourde en application d'une transaction destinée à éviter un contentieux est exonérée de cotisations sociales dans les mêmes conditions que l'indemnité de licenciement.
Dès lors qu'elle remplit les conditions qui viennent d'être décrites, la transaction est définitive dès sa signature. Le salarié ne peut pas revenir sur son accord et contester son licenciement ou réclamer des sommes supplémentaires. A moins de prouver que son consentement n'a pas été libre et éclairé, par exemple parce qu'il ne maîtrisait pas suffisamment la langue française.
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