Faire un procès peut coûter cher et durer longtemps. C'est pourquoi des « modes alternatifs de règlement des litiges » se sont développés. Il s'agit de rechercher une solution amiable au lieu et place d'une décision de justice.
La médiation et la conciliation permettent aux parties de renouer le dialogue et de rechercher, par elles-mêmes et en présence d'une tierce personne, des solutions au conflit qui les oppose. L'une et l'autre peuvent être mises en oeuvre :
- soit en dehors de toute procédure judiciaire. Elles peuvent être prévues en amont, par exemple dans le contrat conclu entre les intéressés ou décidées d'un commun accord une fois le différend survenu ;
- soit dans le cadre d'une procédure judiciaire.
Ces deux procédés se distinguent notamment sur les points suivants :
- la conciliation intervient le plus souvent (mais pas toujours) en amont d'une procédure contentieuse tandis que la médiation est mise en place, le plus souvent, au cours d'une telle procédure ;
- le conciliateur est généralement plus directif que le médiateur ;
- le conciliateur est bénévole tandis que le médiateur est rémunéré ;
- la durée d'une conciliation est de deux mois renouvelable alors que la durée d'une médiation est de trois mois renouvelable une fois.
Le Défenseur des droits et ses délégués peuvent conduire des médiations.
Il existe par ailleurs des médiateurs spécialisés dans de nombreux secteurs d'activité tels le médiateur bancaire, le médiateur de l'AMF, le médiateur des assurances, les commissions départementales de conciliation en matière locative, les médiateurs de La Poste, de la SNCF, d'EDF-GDF, etc. S'agissant des litiges entre consommateurs et professionnels, il y a la « boîte postale 5000 », mais elle n'existe pas dans tous les départements. La généralisation des mécanismes de résolution amiable des litiges entre professionnels et consommateurs est prévue au niveau européen (Dir. 2013/11/UE du 21-5-2013). La France devrait se mettre rapidement en conformité avec ces exigences et faire connaître une première liste des médiateurs de la consommation au début de l'année 2016.
Signalons enfin la procédure participative par laquelle des personnes en litige s'engagent à rechercher une solution amiable avant de saisir le juge. Cette procédure nécessite l'intervention d'un avocat.
Le conciliateur peut intervenir dans des domaines très divers : conflits opposant deux voisins, un consommateur à un professionnel, un propriétaire à un locataire, etc.
Il ne peut pas intervenir dans les litiges mettant en cause l'administration ni dans ceux qui concernent la famille (divorce, pension alimentaire, résidence des enfants, etc.).
SavoirLes conciliateurs sont nommés par le premier président de la cour d'appel dont ils relèvent. Ils sont choisis au regard de leur expérience en matière juridique (au minimum trois ans) et de leur activité. Ils doivent faire preuve d'impartialité (Loi 95-125 du 8-2-1995 art. 21-2). Ils exercent leurs fonctions bénévolement et le recours à un conciliateur est gratuit (Décret 78-381 du 20-3-1978 art 1 s.). Ils tiennent généralement des permanences dans la mairie ou le tribunal d'instance auxquels ils sont affectés.
Le conciliateur peut être saisi par toute personne intéressée, en dehors de toute procédure de justice (CPC art. 1536 s.). Il faut lui écrire, lui téléphoner ou se rendre à l'une de ses consultations.
Le conciliateur peut également être saisi à l'occasion d'un conflit relevant du tribunal d'instance (CPC art. 127 s. et CPC830 s.) :
- avant d'assigner devant le tribunal d'instance, toute personne peut demander une tentative de conciliation. Une telle demande est formée verbalement ou par lettre simple au greffe du tribunal d'instance. La conciliation est confiée à un conciliateur si le juge en décide ainsi. Cette possibilité est aujourd'hui rarement utilisée ;
- une fois le tribunal d'instance saisi, le juge peut, à tout moment, inviter les parties à rencontrer un conciliateur aux lieu, jour et heure qu'il détermine. Ce dernier peut, le cas échéant, se trouver dans une pièce voisine de la salle d'audience. Il examine donc immédiatement l'affaire avec les parties.
Le juge de proximité peut, dans les mêmes conditions, désigner un conciliateur.
Le conciliateur peut aussi être désigné par toute autre juridiction devant laquelle une tentative de conciliation est prévue (sauf devant le juge aux affaires familiales et le conseil de prudhommes). Mais, en pratique, seuls les juges d'instance ont recours aux conciliateurs.
SavoirEngager une conciliation repousse la date limite pour saisir le tribunal : le délai pour agir est suspendu à compter du jour de la première réunion de conciliation ou, en cas d'accord écrit, du jour où les intéressés conviennent de recourir à la conciliation, jusqu'au jour où les intéressés ou le conciliateur déclarent la conciliation terminée. A l'issue de la conciliation, le délai pour agir recommence à courir pour une durée d'au moins six mois (C. civ. art. 2238).
Lorsqu'elles se présentent ensemble, le conciliateur entend les parties et tente de trouver un terrain d'accord (CPC art. 1537 s.). Si le conciliateur est saisi par une seule personne, il invite l'autre partie à se présenter. A défaut de réaction, la conciliation tourne court puisque, à l'évidence, aucun accord ne pourra être trouvé.
Le conciliateur peut recueillir toutes les informations qui lui semblent utiles. Il peut notamment se rendre sur les lieux ou entendre, avec son accord, toute personne de son choix.
Il est tenu de garder le secret sur tous les renseignements qu'il recueille.
Chaque partie peut se faire accompagner d'une personne de son choix, sauf lorsque le conciliateur est désigné pour procéder à la tentative de conciliation avant assignation. Dans ce cas, seules les personnes habilitées à assister les parties devant le tribunal peuvent les accompagner.
La durée d'une conciliation est variable. Lorsque le juge d'instance ou de proximité tente une conciliation par l'intermédiaire d'un conciliateur, il fixe la durée de la mission qui ne peut pas excéder deux mois renouvelables. Mais les parties peuvent mettre fin à la conciliation à tout moment.
Le conciliateur peut suggérer des solutions mais il ne peut pas les imposer.
Si les parties parviennent à trouver un accord, total ou partiel, un constat écrit peut être dressé par le conciliateur (CPC art. 1540). Un tel constat est obligatoire lorsqu'une partie renonce à un droit. Ce document est signé par chaque partie qui en reçoit un exemplaire. Un autre exemplaire est remis au tribunal. Les parties peuvent demander au juge de donner au constat la même force qu'un jugement. Si l'une d'elles ne respecte pas ses engagements, l'autre pourra avoir recours aux modes d'exécution forcée des décisions (une saisie, par exemple).
Si les parties ne parviennent pas à un compromis, elles retrouvent leur liberté d'agir en justice. Elles peuvent notamment demander au conciliateur de transmettre leur requête conjointe au greffe du tribunal.
Les deux domaines privilégiés de la médiation sont :
- les conflits familiaux. Dans une procédure de divorce, le juge peut proposer la désignation d'un médiateur familial pour permettre aux époux d'imaginer ensemble les conditions de leur séparation, notamment l'organisation à mettre en place pour leurs enfants ;
- les conflits collectifs du travail. Par exemple, suite à l'annonce de licenciements collectifs contestés par les syndicats, un médiateur peut être désigné par le juge pour faciliter le dialogue social et la recherche de solutions acceptables par tous.
Mais un médiateur peut aussi être désigné dans d'autres conflits : litiges entre voisins, entre un propriétaire et un locataire, un commerçant et un client.
Le médiateur est désigné par un juge (CPC art. 131-1 s.). C'est un professionnel indépendant qui exerce seul ou dans le cadre d'une association.
Le juge ne peut pas imposer une médiation. Il doit au préalable recueillir l'accord des deux parties. Le juge peut toutefois les inciter à accepter une telle mesure. Dans une procédure de divorce ou dans les conflits portant sur l'exercice de l'autorité parentale, il peut notamment enjoindre aux intéressés de participer à un rendez-vous d'information avec un médiateur.
Le juge fixe la durée de la mesure qui ne peut pas dépasser trois mois renouvelables une fois, soit six mois au total.
La médiation est payante (compter entre 200 et 800 €). Le juge fixe le montant de la somme qui doit être payée d'avance pour que la mesure commence. La prise en charge des frais est en général partagée par moitié entre les parties. A noter que les frais de la médiation peuvent être pris en charge au titre de l'aide juridictionnelle.
A titre expérimental jusqu'au 31 décembre 2014 et auprès de certains tribunaux, le recours à une médiation familiale était obligatoire avant toute demande de modification d'un jugement ayant statué sur les mesures relatives à l'autorité parentale (résidence des enfants, droit de visite et d'hébergement, pension alimentaire). Il n'en allait autrement que dans trois cas : accord des parents sur les modifications demandées, existence d'un motif légitime justifiant que le juge soit saisi sans délai (mise en danger de l'enfant, risque de départ à l'étranger, etc.), impossibilité d'obtenir un rendez-vous avec un médiateur dans un délai raisonnable.
Ce dispositif devrait faire l'objet d'un rapport d'évaluation en vue de décider de sa généralisation, de son adaptation ou de son abandon.
En général, une médiation se déroule sur plusieurs rendez-vous dont le nombre varie de trois à dix. Le médiateur reçoit les parties et les invite à exprimer leur point de vue et à écouter celui de l'autre. Il peut, avec l'accord des parties, entendre toute personne qui y consent et dont l'audition paraît utile.
Il est tenu à un devoir de neutralité et de confidentialité. Pour permettre un véritable dialogue, il est prévu que le médiateur ne peut pas témoigner et que les déclarations qu'il recueille au cours de sa mission ne peuvent pas être utilisées, par la suite, devant le juge. En revanche, le médiateur peut informer le juge des difficultés qu'il rencontre au cours de sa mission. Ces difficultés peuvent d'ailleurs conduire le juge à mettre fin à la médiation avant le terme initialement fixé.
Si, au terme de la médiation, les parties parviennent à un accord, il est consigné dans un procès-verbal qui est soumis au juge et, le plus souvent, homologué. Environ 50 % des médiations familiales aboutissent à un accord.
Si les parties n'ont pas trouvé de compromis, le juge tranche les questions en litige.
SavoirLa procédure est suspendue le temps de la médiation. Mais le juge n'est pas dessaisi de la procédure. Les parties peuvent lui demander, à tout moment, de trancher des questions qui ne sont pas en discussion dans le cadre de la médiation (CPC art. 131-2). Par exemple, un époux peut demander au juge de diminuer la pension alimentaire qu'il verse à son conjoint alors qu'une médiation portant sur l'exercice de l'autorité parentale est en cours.
Le Défenseur des droits est investi de quatre missions :
- défendre les droits et libertés des personnes physiques et morales (sociétés, associations, etc.) dans leurs relations avec l'administration, c'est-à-dire avec l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics et les organismes chargés d'un service public ;
- défendre les droits de l'enfant ;
- lutter contre les discriminations interdites et promouvoir l'égalité ;
- veiller au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité.
Il a donc à connaître des agissements de personnes publiques et privées.
Nommé en conseil des ministres pour six ans et irrévocable, il est une autorité indépendante.
Le Défenseur des droits est assisté d'adjoints dans chacun des domaines dont il est chargé. Il désigne, sur l'ensemble de la France, des délégués qui peuvent, dans leur ressort géographique, instruire les réclamations et participer au règlement des difficultés.
Le recours au Défenseur des droits est gratuit.
Il peut être saisi par toute victime d'un fait relevant de sa compétence. Les mineurs ont la capacité de s'adresser directement à lui ainsi que leurs parents, les membres de leur famille et les services médicaux et sociaux. D'autres personnes peuvent saisir le Défenseur des droits, notamment les députés, les sénateurs et, sous certaines conditions, les associations de défense des droits de l'enfant et celles oeuvrant contre les discriminations. Enfin, le Défenseur des droits peut s'autosaisir.
Aucune démarche préalable ne s'impose, sauf dans le cadre d'un conflit avec l'administration. Dans ce cas, l'intéressé doit obtenir une décision préalable du service concerné.
Pour saisir le Défenseur des droits, il suffit de lui adresser un courrier (7 rue Saint-Florentin, 75049 Paris Cedex 08) en indiquant son identité et ses coordonnées, l'objet de sa requête, le service administratif, l'entreprise ou la personne mis en cause ainsi que les démarches déjà accomplies. Il est aussi possible de remplir un formulaire sur le site Internet du Défenseur des droits ou de saisir son délégué local.
Attention, le fait de s'adresser au Défenseur des droits n'interrompt ni ne suspend le délai pour saisir, le cas échéant, le tribunal.
Pour instruire les requêtes dont il est saisi, le Défenseur des droits possède d'importants pouvoirs d'investigation. Il peut notamment :
- entendre toute personne dont l'audition lui paraît utile, les intéressés étant alors autorisés à se faire assister d'un conseil de leur choix (avocat, collègue, membre de la famille, etc.) ;
- demander communication de toutes informations et pièces utiles ;
- procéder à des vérifications sur place.
Si les personnes mises en cause ne répondent pas à ses convocations ou si elles ne lui permettent pas d'entrer dans les lieux, le Défenseur des droits peut saisir le juge.
Il dispose de trois moyens pour résoudre directement les conflits :
- en formulant des recommandations qu'il peut fonder sur l'équité et pas uniquement sur le droit. Si ses recommandations ne sont pas suivies d'effet, il fait injonction à la personne mise en cause de prendre les mesures nécessaires ;
- en procédant à une médiation entre les intéressés ;
- en proposant une transaction qui peut passer par le paiement d'une amende transactionnelle, l'indemnisation de la victime et la publication ou l'affichage d'un communiqué.
Le Défenseur des droits participe, le cas échéant, au déclenchement des procédures adaptées. Il peut aider la victime d'une discrimination ou d'une violation des droits de l'enfant à constituer son dossier, citer la personne mise en cause devant un tribunal pénal ou saisir l'autorité disciplinaire compétente.
Il dispose enfin de compétences plus générales puisqu'il est autorisé d'une part à saisir le Conseil d'Etat pour qu'il donne son avis sur l'interprétation d'une loi ou d'un règlement et d'autre part à recommander des modifications législatives ou réglementaires.
Signalons, et c'est un moyen de pression non négligeable, que le Défenseur des droits est en droit de rendre publics ses avis, recommandations ou décisions.
Le Défenseur des droits établit un rapport annuel qui rend compte de son activité générale avec des annexes pour chacun de ses domaines de compétence. Il rédige également un rapport consacré aux droits de l'enfant à l'occasion de la Journée internationale des droits de l'enfant.
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