Le Gouvernement vient d’annoncer la disparition du régime social des indépendants au 1er janvier 2018. Cette mesure emblématique devrait s’accompagner de la mise en œuvre d’autres engagements de campagne du Président de la République tels que la baisse des cotisations des intéressés.
Le Programme du Gouvernement en faveur des travailleurs indépendants présenté le 5 septembre dernier reprend de nombreux engagements de campagne du Président de la République, notamment la suppression du régime social des indépendants (RSI) et l’adossement de la protection sociale des indépendants au régime général, l’allègement des cotisations sociales et l’augmentation des plafonds pour bénéficier du régime de la micro-entreprise. Certaines de ces mesures devraient figurer dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 qui doit être présenté le 27 septembre prochain.
Nous présentons ci-dessous l’essentiel des mesures annoncées.
Le régime social des indépendants serait supprimé au 1er janvier 2018
Le RSI serait supprimé au 1er janvier 2018 et ses missions confiées au régime général dont le champ d’application serait étendu aux travailleurs indépendants.
Cette nouvelle organisation de la protection sociale des travailleurs indépendants devrait être inscrite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.
A noter : Cette réforme vise à mettre un terme aux dysfonctionnements du RSI, régulièrement dénoncés par ses assurés. Ces dysfonctionnements sont notamment liés à des applications informatiques inadaptées générant des erreurs ou allongeant les délais de traitement. Le Gouvernement reconnaît que des améliorations de gestion ont été réalisées, notamment grâce à l’engagement des équipes du RSI, mais il estime que la relation de confiance est aujourd’hui altérée entre les indépendants et leur régime de sécurité sociale et qu’il convient donc de franchir une nouvelle étape pour une organisation plus efficace et plus moderne.
Les travailleurs indépendants bénéficieraient, au sein du régime général, d’une organisation dédiée à leur protection sociale. Les règles en matière de cotisations des indépendants devraient demeurer inchangées. La réforme n’aurait pas non plus d’impact sur les spécificités de la protection sociale des intéressés relatives à l’action sociale , à la prise en charge des cotisations pour les assurés en difficulté , aux régimes de retraite complémentaire .
Les prestations d’assurance maternité devraient, en revanche, évoluer en 2019 dans le sens d’une convergence avec celles servies par le régime général. Les particularités du travail indépendant devraient être prises en compte pour la fixation des nouvelles modalités de ces prestations.
Le Gouvernement met en avant un autre avantage de la réforme : la suppression des démarches accomplies par les assurés passant d’une activité salariée à une activité indépendante ou vice-versa. La réforme envisagée devrait permettre à un salarié devenant indépendant de rester affilié à sa caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). La validation de ses périodes cotisées devrait être effectuée par sa caisse d’assurance vieillesse, qu’il s’agisse de périodes effectuées sous statut indépendant ou salarié.
Compte tenu de l’ampleur de la réforme, elle devrait être mise en œuvre de manière progressive puisque le gouvernement envisage une période transitoire de 2 ans. Au cours de cette période, les missions du RSI seraient progressivement confiées aux caisses locales et régionales du régime général. Le pilotage de ces missions serait immédiatement assuré par les caisses nationales du régime général (Cnamts, Cnav et Acoss). L’organisation définitive de la protection sociale des indépendants au sein du régime général devrait être en place au plus tard le 31 décembre 2019.
Une baisse des cotisations compenserait la hausse de la CSG
Le programme du Gouvernement en faveur des travailleurs indépendants comporte un volet destiné à améliorer leur pouvoir d’achat avec un transfert du financement de la sécurité sociale des cotisations de sécurité sociale vers la contribution sociale généralisée (CSG).
L'augmentation de la CSG de 1,7 point au 1er janvier 2018 devrait être compensée, pour les travailleurs indépendants, par une baisse de leurs cotisations sociales. Sont ainsi envisagées :
- - une baisse de 2,15 points de la cotisation d’allocations familiales pour tous les travailleurs indépendants. Selon le Gouvernement, cette mesure se traduirait par une suppression de la cotisation d'allocations familiales pour la très grande majorité des travailleurs indépendants ;
- - et un renforcement de la dégressivité du taux de la cotisation maladie-maternité qui pourrait atteindre 5 points et serait étendue aux travailleurs indépendants réalisant un revenu annuel d’activité inférieur à 43 000 € environ.
Le gain obtenu de ces mesures serait, selon les chiffres donnés par le Gouvernement, de 270 € par an pour un travailleur indépendant ayant un revenu mensuel égal au Smic et de 550 € par an pour un travailleur indépendant ayant un revenu mensuel de 2 400 €.
Ces mesures devraient être inscrites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.
Le taux de la cotisation d’allocations familiales est actuellement égal à :
- 2,15 % pour un revenu d’activité annuel inférieur ou égal à 110 % du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass) (43 150,80 € en 2017) ;
- 5,25 % pour un revenu d’activité annuel supérieur à 140 % de ce plafond (54 919,20 € en 2017) ;
- un taux croissant compris entre 2,15 % et 5,25 % pour un revenu d’activité compris entre 110 % et 140 % de ce plafond.
Le taux de la cotisation maladie-maternité , en principe fixé à 6,5 %, fait l’objet d’une réduction dégressive dans la limite de 3,5 points pour les travailleurs indépendants réalisant un revenu d’activité inférieur à 70 % du Pass (soit, en 2017 27 459,60 €).
Les médecins conventionnés de secteur 1 et les infirmiers conventionnés en zone sous-dense bénéficieraient d’une hausse de la prise en charge des cotisations d’assurance vieillesse de base par l’assurance maladie afin de compenser la hausse de la CSG. L’assurance maladie et les représentants de chacune des professions concernées devraient conclure des avenants conventionnels afin de permettre une mise en œuvre effective de cette mesure dès 2018.
A noter : Les praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés bénéficient actuellement d’une prise en charge partielle de leurs cotisations maladie et d’allocations familiales par les caisses d’assurance maladie. La baisse des cotisations prévues pour les autres travailleurs indépendants pour compenser en partie la hausse de la CSG ne peut donc jouer pour les intéressés. Signalons que le dossier de presse du Gouvernement vise, comme bénéficiaires de la prise en charge partielle de la cotisation d’assurance vieillesse de base par l’assurance maladie, les médecins conventionnés de secteur 1 et les infirmiers conventionnés en zone sous-dense mais le champ de la mesure pourrait être plus large. En effet, selon un communiqué de presse du Ministère des Solidarités et de la Santé du 6 septembre 2017, seraient concernés les médecins de secteur 1, les médecins souscrivant à une option tarifaire maîtrisée (OPTAM) et les paramédicaux dont une partie des cotisations est prise en charge par la sécurité sociale (www.solidarités-sante.gouv.fr).
Les créateurs d'entreprise bénéficieraient d'une exonération de cotisations pendant un an
Le programme gouvernemental consacre un volet au soutien à la création ou à la reprise d’entreprise avec, pour principale mesure, la mise en place d’un dispositif généralisé d’exonération de cotisations de sécurité sociale.
A compter du 1er janvier 2019, l’Accre (aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise) serait ouverte à l’ensemble de travailleurs indépendants créant ou reprenant une entreprise. Cette mesure devrait, selon le Gouvernement, concerner 350 000 nouveaux créateurs d’entreprise.
Actuellement , l’Accre est notamment réservée aux demandeurs d’emplois indemnisés ou susceptibles de l’être et à ceux non indemnisés inscrits à Pôle emploi depuis 6 mois au cours des 18 derniers mois, aux personnes remplissant les conditions pour percevoir l’allocation de retour à l’emploi, aux bénéficiaires de l’allocation de solidarité spécifique, ou du RSA ou du complément du libre choix d’activité ou leur conjoint ou concubin, aux jeunes de 18 à moins de 26 ans et aux personnes de moins de 30 ans handicapées ou ne remplissant pas la condition d’activité antérieure pour bénéficier des allocations chômage, aux personnes créant ou reprenant une entreprise dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.
Cette ouverture de l’Accre permettrait à tous les travailleurs indépendants créant ou reprenant une entreprise de bénéficier, pendant 12 mois, d’une exonération de cotisations de sécurité sociale :
- totale en cas de revenu annuel inférieur à 30 000 euros ;
- dégressive si le revenu annuel ne dépasse pas 40 000 euros.
Tous les créateurs et repreneurs d’entreprise relevant du régime micro-social pourraient bénéficier des exonérations dégressives prévues, dans le cadre de l’Accre, pendant 3 ans.
Actuellement , les micro-entrepreneurs bénéficiant de l’Accre se voient appliquer un taux de versement forfaitaire libératoire minoré . Celui-ci est égal à une fraction des taux de droit commun de ce versement fixé à :
- 25% jusqu’à la fin du troisième trimestre civil suivant celui au cours duquel intervient la date d’effet de l’affiliation ;
- 50 % pour les 4 trimestres civils suivants ;
- 75 % pour les 4 trimestres civils suivants.
Le volet du programme gouvernemental dédié au soutien à la création et à la reprise d’entreprise prévoit également la désignation par l’Urssaf d’un interlocuteur unique pour accompagner le travailleur indépendant dans ses démarches et l’informer sur les exonérations dont il pourrait éventuellement bénéficier.
Les plafonds pour bénéficier du régime de la micro-entreprise seraient augmentés
Les plafonds du régime fiscal
de la micro-entreprise (micro-BNC et micro-BIC) seraient portés, à compter de 2018, à :
- 170 000 euros contre 82 800 euros actuellement pour les activités de vente de marchandises, de vente à consommer sur place et de fourniture de logement (hors location meublée autre que meublé de tourisme ou chambre d’hôte) ;
- 70 000 euros contre 33 200 euros actuellement pour les autres activités de prestations de service.
Ces plafonds s’appliquent au chiffre d’affaires annuel réalisé par le travailleur indépendant.
A noter : Le Gouvernement semble envisager une déconnexion des régimes micro-fiscal et micro-social, actuellement liés sauf exceptions, puisqu’il est précisé que le relèvement des plafonds du régime micro-fiscal devrait bénéficier à l’ensemble des travailleurs indépendants et non aux seuls bénéficiaires du régime micro-social mais on voit mal à ce jour quelles sont les ambitions réelles du gouvernement en la matière.
L’appréciation des plafonds pour bénéficier du régime micro-social devrait s’effectuer sur une base annuelle et non proratisée pour les travailleurs indépendants ayant une activité saisonnière .
Les formalités et obligations des travailleurs indépendants seraient simplifiées
Un quatrième volet de mesures vise à simplifier les formalités incombant aux travailleurs indépendants. Seraient ainsi prévus :
- la possibilité de demander en ligne des délais de paiement et le bénéfice de délais de paiement par anticipation (échéance octobre 2017) ;
- le paiement par carte bancaire des cotisations (échéance novembre 2017 pour les professions libérales et février 2018 pour les commerçants et artisans s’acquittant de leurs cotisations tous les trimestres) ;
- le recouvrement effectif par les Urssaf des cotisations d’assurance maladie dues par les professionnels libéraux (échéance 1er janvier 2018) ;
- la mise en place d’une application permettant aux micro-entrepreneurs d’effectuer leurs déclarations et paiements depuis leur smartphone ou tablette numérique (échéance premier trimestre 2018) ;
- la refonte du site internet www.lautoentrepreneur (échéance troisième trimestre 2018) ;
- l’ouverture aux travailleurs indépendants des services en ligne dont les salariés bénéficient pour la gestion de leur retraite (courant 2018) ;
- la possibilité de moduler le montant des acomptes mensuels ou trimestriels en fonction de l'activité (expérimentation en 2018 et généralisation en 2019) ;
- la mise en place d’une déclaration unique effectuée en ligne remplaçant les déclarations sociales et fiscales des travailleurs indépendants (2020 au plus tard). Notons que le Gouvernement ne semble plus envisager l’unification des assiettes des prélèvements fiscaux et sociaux.
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