Un décret revalorise le montant de l’indemnité légale de licenciement, mais uniquement pour les 10 premières années d’ancienneté du salarié licencié. Ce texte complète la réforme déjà opérée par ordonnance, qui abaisse, de 1 an à 8 mois, l’ancienneté exigée du salarié pour avoir droit à l’indemnité.
Le décret adapte également les dispositions réglementaires relatives aux paramètres pris en compte dans le calcul de l’indemnité, pour tenir compte de l’ordonnance.
Rappelons que l'indemnité légale de licenciement bénéficie à tout salarié appartenant au secteur privé ou public (exception faite des fonctionnaires), quel que soit l'effectif de l'entreprise. Il s'agit d'une indemnité minimale, versée à défaut de dispositions plus favorables de la convention collective, d'usages ou du contrat de travail.
Une indemnité doit être versée dès 8 mois d’ancienneté
Désormais, l'indemnité légale est attribuée au salarié justifiant de 8 mois d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur , au lieu d’un an auparavant (C. trav. art. L 1234-9 modifié par l'ordonnance).
Ainsi, un salarié qui, à la date d’envoi de la lettre de licenciement, a au moins 8 mois d’ancienneté, a droit à une indemnité.
En effet, selon la Cour de cassation, les droits du salarié à l’indemnité de licenciement s'apprécient à la date d'envoi de la lettre de rupture (Cass. soc. 11-1-2007 n° 04-45.250 : RJS 3/07 n° 330).
On notera que les modalités de calcul de l’ancienneté ne sont pas modifiées.
Le taux de l’indemnité est réévalué pour les 10 premières années d’ancienneté
L’indemnité de licenciement ne peut pas être inférieure à (C. trav. art. R 1234-2 modifié par le décret) :
- un quart de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années jusqu’à 10 ans, au lieu d’un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté antérieurement ;
- un tiers de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années à partir de 10 ans. Ce taux est inchangé.
La détermination de l’ancienneté et du salaire entrant dans le calcul de l’indemnité est adaptée
Les définitions du salaire et de l’ancienneté du salarié, paramètres de calcul de l’indemnité, sont adaptées par le décret du 25 septembre 2017, pour tenir compte de la diminution de l’ancienneté requise pour avoir droit à celle-ci.
La définition du salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement n’est pas modifiée en son principe. Ce salaire est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié (C. trav. art. R 1234-4 modifié par le décret) :
1° soit le douzième de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement.
Il est désormais précisé que lorsque la durée de service du salarié est inférieure à 12 mois , on prend en compte la moyenne mensuelle de la rémunération de l’ensemble des mois précédant le licenciement ;
2° Soit le tiers des 3 derniers mois . Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion. Ces dispositions ne sont pas modifiées.
S’agissant de l’ancienneté , l'indemnité de licenciement est calculée par année de service dans l'entreprise en tenant compte des mois de service accomplis au-delà des années pleines.
Il est désormais prévu qu’en cas d’année incomplète, l’indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets (C. trav. art. R 1234-1 modifié par le décret).
Cette réforme a des répercussions sur d’autres cas de rupture du contrat de travail
Licenciement pour inaptitude physique
Le salarié licencié pour inaptitude physique à la suite d’une maladie ou d’un accident professionnels a droit à une indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité légale minimale de licenciement (C. trav. art. L 1226-14), quelle que soit son ancienneté (Cass. soc. 25-5-1994 n° 91-40.442 D).
Les salariés concernés par ces dispositions se voient donc appliquer la réévaluation de l’indemnité opérée par le décret 2017-1398 du 25 septembre 2017. En revanche, l’abaissement de la condition d’ancienneté est sans conséquence pour eux.
Le salarié bénéficie, si elle lui est supérieure, de l'indemnité conventionnelle de licenciement (Cass. soc. 10-5-2005 n° 03-44.313 F-PB : RJS 7/05 n° 731), sachant que cette indemnité n'est doublée que si la convention collective le prévoit expressément (Cass. soc. 22-1-1992 n° 89-40.147 P : RJS 3/92 n° 276 ; 25-3-2009 n° 07-41.708 F-PB : RJS 6/09 n° 523).
Le salarié licencié pour inaptitude physique à la suite d’une maladie ou d’un accident non professionnels a droit à l'indemnité légale de licenciement, calculée compte tenu de son ancienneté incluant la durée du préavis qui aurait été dû si le salarié avait été en mesure de l'exécuter (C. trav. art. L 1226-4).
Les salariés concernés bénéficient de l’abaissement de la condition d’ancienneté prévue par l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 et de la réévaluation de l’indemnité opérée par le décret 2017-1398 du 25 septembre 2017.
Rupture conventionnelle homologuée
Selon l'administration, le salarié qui conclut une rupture conventionnelle homologuée avec son employeur peut prétendre, s’il a moins d'un an d'ancienneté à une indemnité calculée au prorata du nombre de mois de présence (Circ. DGT 2009-4 du 17-3-2009). Selon nous, cette doctrine, favorable aux salariés, n’est pas remise en cause par les modifications intervenues dans le régime de l’indemnité de licenciement. Ainsi, par exemple, un salarié ayant 6 mois d’ancienneté a droit à une indemnité en cas de rupture conventionnelle homologuée.
Le montant de l'indemnité de rupture conventionnelle homologuée, fixé par la convention signée entre l’employeur et le salarié, ne peut pas être inférieur à celui de l'indemnité légale de licenciement (C. trav. art. L 1237-13). Il est donc réévalué dans les mêmes proportions que celui de l’indemnité légale de licenciement.
Précisons que dans les entreprises relevant de branches d'activité représentées par le Medef, la CGPME ou l'UPA, l'indemnité de rupture conventionnelle ne peut pas être inférieure à l’indemnité conventionnelle de licenciement si elle est supérieure à l’indemnité légale.
Mise à la retraite
La mise à la retraite d'un salarié lui ouvre droit à une indemnité de mise à la retraite au moins égale à l'indemnité de licenciement (C. trav. art. L 1237-7). Les modifications apportées au calcul de l’indemnité de licenciement se répercutent donc sur le calcul de l’indemnité de mise à la retraite.
On rappelle que le salarié a droit une indemnité conventionnelle ou contractuelle de départ à la retraite lorsqu'elle est plus favorable.
Cette réforme entre en vigueur immédiatement
Le décret 2017-1398 du 25 septembre 2017 est applicable aux licenciements et mises à la retraite prononcés et aux ruptures conventionnelles conclues à partir du 27 septembre 2017 (Décret art. 5).
Le prononcé du licenciement et de la mise à la retraite correspond à l'envoi de la lettre de rupture du contrat (Cass. soc. 28-11-2006 n° 05-42.202 F-PB ; 4-3-2015 n° 13-16.148 F-D).
A notre avis, par précaution, et pour éviter tout litige, il convient, pour les ruptures conventionnelles déjà conclues mais pas homologuées de réévaluer, le cas échéant, le montant de l'indemnité accordée pour tenir compte de la réforme.
L'ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 s'applique aux licenciements prononcés à partir du 24 septembre 2017 (Ord. art. 40).
Ses dispositions, abaissant l'ancienneté requise pour bénéficier de l'indemnité, peuvent selon nous entrer en vigueur de façon autonome, dès le 24 septembre 2017.
Exemple —————————————————————————————————————
Ainsi, par exemple, si une lettre de licenciement est envoyée le 25 septembre 2017, le salarié qui, à cette date, a 9 mois d'ancienneté, a droit à une indemnité.
Comment doit-on calculer celle-ci ? Selon le nouveau barème, plus favorable, ou selon l'ancien ? Si l'on s'en tient à la lettre du décret, le nouveau barème ne devrait pas être applicable à un licenciement prononcé avant le 27 septembre 2017. Dans ce cas particulier, où l'indemnité ne sera pas d'un montant élevé en raison de la faible ancienneté du salarié, on peut penser que l'employeur pourra accorder une indemnité calculée selon ce nouveau barème.
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